La vie à deux, L'Œil de la lettre, 1991


Recueil de nouvelles publié d'abord sous le titre Comme ils sont, Denoël, 1960


Comme une valse :

Mauvaise journée demain :


Poèmes :

Articles :

Nouvelles
en anglais :

 
Dorothy Parker (1893-1967)
Nouvelles au choix

Nous avons lu cette auteure pour le 4 février 2022.
Voir en bas de page des infos autour du livre : biographie, Dorothy Parker scénariste, Dorothy Parker portée au théâtre  et ses livres.

Nous avons lu en priorité l'un de ces deux recueils :

La vie à deux
préface et traduction Benoîte Groult, 10/18, 2011, 256 p.

(16 nouvelles)
Publiées d'abord sous le titre Comme ils sont (Here We Are), Denoël, 1960

Comme une valse
trad. Michèle Valencia, 10/18, 1992, 288 p.
(19 nouvelles et 4 articles)

 

NOS 15 COTES D'AMOUR
Annick LFannyLaura Séverine
BrigitteCatherineClaire •Danièle DenisMonique LNathalieRozenn
  •Jacqueline EtienneFrançoise

Toujours notre triple formule inaugurée en septembre 2021 : lecture des réactions transmises, alternance entre les avis des présents et de ceux simultanément à l'écran...

Françoise(avis transmis)
Avec Angela Carter ou Sylvia Plath (La Cloche), j'avais eu un a priori plutôt négatif, une appréhension (Sylvia Plath s'est suicidée), et finalement j'ai aimé ce que j'ai lu de ces deux écrivaines.
Et avec Dorothy Parker c'est tout l'inverse, moi confiante au début (bien que je n'aime pas les nouvelles ah ah), j'ai vite déchanté. Tout d'abord je me suis dit qu'elle était très très anti-mecs, mais finalement ses portraits de femmes ne sont pas mieux. Quel pessimisme, quelle vision négative de l'humain. Jamais ils ne sont rachetés. Elle nous restitue une société fermée, confite dans des principes rigides, raciste évidemment. Au début j'ai aimé l'humour noir et mordant, la justesse de la réflexion, les portraits sans concession, mais au bout d'un moment j'ai crié au secours trop c'est trop. Jamais une petite lumière. C'est désespérant. Quand j'ai compris que toutes les nouvelles étaient du même tonneau, j'ai arrêté pour cause d'overdose.
La Dorothy Parker de Prince n'a rien à voir avec l'écrivaine. La sienne elle est serveuse, et un peu plus fofolle.
Je l'ouvre un quart pour la découverte de cette Dorothy que je ne connaissais pas.
Nathalie(avis transmis)
J’ai lu mais je suis charrette pour rédiger ma contribution !
J’ouvre aux ¾ ! Très très méchante mais jouissive ! Un peu dépassé ! Mais le plaisir est là : on se demande à quel endroit le javelot empoisonné va porter sa plaie !!!

Claire
Pourquoi "dépassé", Nathalie (qui n'a plus que des points d'exclamation pour évoquer Dorothy Parker) ?

Nathalie
Parce que les situations semblent parfois très décalées de nos vies actives contemporaines (par exemple la femme qui attend son mari de retour de permission et qui a anticipé en achetant une nuisette).

Claire
J’ai quantité de situations analogues dans le livre que je lis...
Etienne
C'est avec délectation qu'on lit ses petites nouvelles très (trop ?) sarcastiques qui n'ont pas pris une ride tant les dynamiques qui régissent nos rapports humains au sens large (le couple n'est pas le seul, et loin de là, à être égratigné) semblent immuables. Certes il y a plus d'égalité homme/femme et la société est probablement moins patriarcale que celle des États-Unis des années 20, mais j'ai l'impression que le propos de Dorothy Parker dépasse ça. Je suis persuadé qu'elle pourrait trouver exactement les mêmes types de dialogues dans autant de situations. À ce titre, elle a vraiment un esprit journalistique ou humoristique, c'est-à-dire celui d'observateur. Les dialogues sont faussement banals et millimétrés, et le format des nouvelles est parfaitement adapté : on prend une petite dose de cruauté et ça repart. Je pense qu'un roman intégral sur ce rythme se serait essoufflé (encore qu'il existe bien Belle du Seigneur…)
Il est question de nos mesquineries, de nos égoïsmes, nos hypocrisies, bref de la facette que l'on n'est pas vraiment fier de montrer. Dans l'esprit, elle me fait penser aux personnages de Riad Satouff ou d'Albert Cohen donc : jamais franchement méchants, mais vraiment tous montrés sous l'angle de leur médiocrité la plus profonde.
Ma nouvelle préférée fut "Vêtir ceux qui sont nus" parce qu'on entrevoit un peu de lumière (l'amour inconditionnel de Big Lannie pour Raymond) et que les sujets abordés (la pauvreté, le racisme, le handicap) sont un peu moins "frivoles" que celui de la discussion plate et atterrante d'un couple qui vient de se marier. C'est probablement là que Dorothy Parker prend plus d'ampleur et dépasse son costume d'ancienne journaliste de Vogue. Je l'ouvre à moitié.
Monique L
L'absence de communication est le thème principal de ces nouvelles, soit parce qu'on a rien à se dire, soit que l'on attribue un sens désagréable à toute parole de l'autre ou soit encore que l'on n'écoute pas l'autre, persuadé que l'on a raison. Ce qui est étonnant, c'est que chacune de ces nouvelles - bien que le sujet soit pour ainsi dire identique - est intéressante. Elles sont plus variées que je ne l'imaginais. Toutes sont originales, étonnantes, poignantes.
La première nouvelle, "Quel dommage !", est celle qui m'a sans doute le plus touchée. L'absence d'échanges dans le couple est telle que chacun s'accommode d'un environnement qui lui déplaît, car il pense que cela plaît à l'autre. C'est cruel, ironique et cela m'a réellement interpellée. La nouvelle "Le coup de téléphone" qui se résume en un monologue est désopilante et également très réussie. La nouvelle "Les bonnes amies" où la bonne amie qui rend visite à son amie malade et dépressive et ne lui laisse jamais la parole est tragi-comique.
L'auteure se montre féroce et impitoyable, mais on sent malgré tout de la compréhension et de l'humanité.
Toutes ces tranches de vie sont réalistes. Certaines de ces femmes pénibles, d'autres sont par contre attachantes comme l'ancienne reine de beauté ("La grande blonde"), et d'autres sont franchement antipathiques comme celle qui a adopté un enfant ("Le petit Curtis"). Ce qui est souvent présent c'est l'importance du paraître.
Ces nouvelles sont bien construites avec énormément de talent. La plume est toujours acide. L'auteure manie à merveille la dérision et fait preuve d' un grand sens du rythme. Ce sont de petites merveilles ni trop courtes, ni trop longues. J'ouvre aux ¾.
Jacqueline
J'ai commencé par lire le recueil
Mauvaise journée demain dont le titre m'enchantait.
J'ai été assez amusée par cette lecture dont je garde une impression de facilité un peu vaine, sans doute due au milieu un peu vide et restreint qui est décrit. J'avais aussi le sentiment que c'était toujours un peu la même chose même si les personnages et les situations variaient…
En lisant la biographie que Claire nous avait donnée, j'ai été frappée par la contemporanéité et le parallèle que l'on pourrait établir avec Hemingway. J'avais déjà pensé à lui et au style de certaines de ses nouvelles où les sentiments ne sont
montrés que par les actions des personnages ou au travers de leurs dialogues. Mais alors qu'Hemingway suscite l'empathie avec ses personnages, il me semble que la forme et le sujet des nouvelles de Dorothy Parker étaient tout à fait adéquats au public des revues qui les ont publiées, un peu comme les chansonniers dont le succès reposaient sur leur capacité à se moquer des spectateurs venus pour ça… Il me semble, aussi, que ce type de nouvelles ne gagnent pas à être lues d'une traite, comme je l'ai fait en enchaînant avec La vie à deux et Comme une valse, mais qu'il serait mieux de les déguster semaine après semaine dans un magazine…
Dans le recueil Comme une valse, j'ai apprécié de trouver des notes, des dates et le titre anglais des nouvelles. J'ai pu les situer en référence à la biographie qui donne les titres anglais des recueils.
L'ombre d'Hemingway planait encore pour moi sur "Soldats de la république", la dernière nouvelle parue de Dorothy Parker. Elle raconte la rencontre, à une terrasse de Valence je crois, entre la narratrice accompagnée d'une journaliste nordique et des soldats de la République espagnole en brève permission… Je ne doute pas des faits rapportés, mais je n'ai guère ressenti d'empathie, sinon le sentiment d'extériorité de la narratrice. J'ai été très étonnée, cependant, de découvrir à cette occasion que la Guerre d'Espagne avait aussi été une guerre de tranchées ! À cause de cela, j'ouvrirai à moitié…
Danièle        
J'ai lu La vie à deux. C'est une critique de la société de l'époque qui serait valable en partie encore pour la nôtre, et c'est une analyse de caractère. Finalement, c'est une sorte de comédie humaine en plusieurs volets.
Mais quelle noirceur ! Rien n'échappe à la critique acerbe de Dorothy Parker. Certaines nouvelles m'ont carrément mise mal à l'aise. D'une part parce qu'elle touche à certains points faibles que j'ai reconnus en moi ou chez les autres : la jalousie, les idées noires qui vous bouffent, les difficultés de contact avec les personnes différentes, par exemple pour moi une personne défigurée que je côtoie. Elle met le doigt là où ça fait mal. D'autre part, au contraire, parce que j'ai du mal à imaginer une telle noirceur chez certains des personnages, méchants, hypocrites, égoïstes ou radins.
Au fur et à mesure de ma lecture, j'ai constaté que, contrairement aux apparences, il y avait une grande diversité de thèmes. En tout cas, le thème récurrent, la difficulté de communiquer, en particulier dans la vie à deux, est très bien représenté par la couverture du livre représentant un tableau de Hopper :

c'est bien l'atmosphère d'incommunicabilité, avec les souffrances que cela implique, particulièrement bien rendues dans la première nouvelle "Quel dommage !" : un couple qui semble parfait vu de l'extérieur, mais qui s'ennuie et se joue la comédie depuis de longues années, décide enfin de divorcer. Est-ce vraiment aussi dommage que le pense leur entourage bien-pensant, demande allusivement Dorothy Parker...
Le coup de téléphone illustre les affres de l'attente d'un coup de fil d'une personne qui, elle, a déjà fait sa vie ailleurs et n'éprouve aucun besoin de communiquer.
Un autre thème traverse les nouvelles : ces gens qui font croire qu'ils font le bien autour d'eux, alors qu'en fait ils ne pensent qu'à leur intérêt. On trouve ce thème dans "Le merveilleux Vieux Monsieur" : M. et Mme Bain s'occupent du Vieux Monsieur, mais c'est la sœur de Mme Bain qui s'arrange pour avoir tous les sous du Vieux Monsieur à sa mort. De même, dans "Vêtir ceux qui sont nus", Big Lannie, la maman de Raymond le petit aveugle, est accablée par toutes sortes de malheurs, mais, par dignité, n'en parle pas, et perd ses emplois. Ses anciens employeurs, enfermés dans leurs idées préconçues vis-à-vis des domestiques, noirs de surcroît, estiment qu'ils font preuve de trop de générosité en lui accordant quelques miettes.
La jalousie des femmes délaissées, dans le calme avant la tempête, ou dans "Les sexes", fait ses ravages, qu'elle soit justifiée ou non. Dans "Sentimentalité", le personnage féminin, dont pour une fois on ne connaît pas le nom, essaie de sauver les apparences, de paraître heureuse alors qu'elle est défoncée par la tristesse. "Le rouge, c'est la couleur du deuil, rouge écarlate pour un amour mort !"
Autre thème dans deux nouvelles très différentes : les personnes qui jugent les autres d'après leur apparence. Dans "La jument", Mme Wilmaert, au faciès de jument, est victime de sa laideur. Jamais le couple qui emploie cette infirmière n'essaiera de la connaître au-delà de cette apparence. Toute communication est coupée de ce fait. Dans "Arrangement en noir et blanc", c'est la difficulté pour certains, victimes de leur pensées racistes, surtout à l'époque de Dorothy Parker, mais encore maintenant dans certains milieux, de communiquer sans arrière-pensée avec des gens de couleur.
Finalement, Dorothée Parker divise les personnages en deux catégories :
› les dominants : cyniques, profiteurs et égoïstes, catégorie largement représentée par ses personnages masculins, mais aussi par ces femmes d'une certaine classe sociale bourgeoise, décrites dans leur intérieur qui est à leur image ;
› et les dominés : personnages gentils, sentimentaux et naïfs, largement représentés par des femmes qui se font délaisser par les hommes.
Dans "Monsieur Durant", ce personnage est l'exemple parfait d'un égoïsme masculin mais aussi de classe. "Pas le moindre mot de consolation pour la jeune fille" (enceinte de lui). Il peut régler ces "ennuis" avec de l'argent.
Dorothy Parker ne semble avoir aucune tendresse pour les personnages qu'elle critique, ou plutôt qu'elle torpille avec jubilation. Souvent nous jubilons avec elle, par exemple dans certaines descriptions : "[l'expression de son visage] ne servait qu'à mettre en évidence l'étrange ressemblance qui pesait sur elle depuis ses jeunes années: son visage ne prenait vraiment son sens qu'accompagné de ce regard d'affection mélancolique qui est particulier à notre frère le cheval". Ou encore : "Il était large d'épaules et de torse, mais étroit de partout ailleurs". Tout est dans la chute, procédé que Dorothy Parker affectionne.
Dernière phrase du recueil : "Venez faire une piqûre calmante à Madame. Je l'ai trouvée dans un état !", alors que c'est elle, sa bonne amie présumée, qui l'a mise dans cet état.
Son style acerbe et concis, qui joue sur les sous-entendus et sur l'humour noir, ses flèches bien ajustées et la portée de ses critiques font pour moi l'intérêt de ce recueil que j'ouvre finalement aux ¾, après avoir été dans un premier temps gênée par la noirceur de l'ambiance générale.
Brigitte        
Je n'ai pas été bonne élève, car je n'ai lu que les trois nouvelles du petit livre Monsieur Durant et autres histoires de couple, publié par Sillage, éditeur près de chez moi.
C'est surtout la première que je retiens, "Monsieur Durant", que j'ai trouvée magistrale. J'avais écouté une conférence analysant l'ouvrage d'Alain Cugno La séduction du diable : réflexions sur la question du mal et cette nouvelle en est une illustration : M. Durant fait des choses horribles en refoulant (volontairement?) toute prise de conscience de ses actes. Jamais il ne laisse émerger le moindre mot critiquable. Le mal est innommable ! Il y a là une dimension universelle : le mal dans la vie quotidienne, insidieux, caché, jamais désigné comme tel. J'ai trouvé ce texte absolument magnifique, d'une économie d'écriture, d'une justesse, d'une finesse admirables. C'est une illustration parfaite du fait que la décision de faire le mal (ou le bien) se joue au plus intime de chacun de nous, à la limite de l'indicible. J'ouvre aux ¾.
Catherine
  

J'ai lu La vie à deux que j'avais déjà lu il y a plus de 30 ans, mais dont j'avais oublié le contenu et jusqu'à l'existence, Comme une valse que j'ai presque fini et une nouvelle de Mauvaise journée demain.

J'ai tout d'abord bien aimé la plupart des nouvelles sur le couple, et particulièrement la première : c'est très noir, cruel mais très bien vu.
C'est bien écrit, bien construit, condensé, avec un vrai sens des formules. Dorothy Parker crée, en quelques pages, l'atmosphère, le décor, les personnages, on est dedans. C'est drôle, méchant, on n'est pas forcément ému.e, mais on est dedans.
C'est une peinture très caustique de la société new-yorkaise de son époque, mais ça ne se limite pas à ça, ça reste au fond très actuel. D'autres thèmes sont abordés, outre le couple : les rapports sociaux, qui sont parfois très violents, le racisme, l'hypocrisie d'une bourgeoisie bien pensante. Je suis d'accord avec Danièle : on se dit, c'est très juste, on se reconnaît, c'est assez universel. Certaines nouvelles sont horribles ("La jument", "Monsieur Durand". Les personnages féminins ne sont pas gâtés, mais les hommes non plus, même s'ils sont assez en arrière-plan. C'est une vision très noire de la société, on comprend qu'elle ait pu abuser de l'alcool.
J'ai eu malgré tout un peu un sentiment de répétition, bien qu'aucune nouvelle ne soit semblable. Comme une valse aborde d'autres thèmes, la guerre par exemple, avec des nouvelles comme "La jolie permission". J'ai beaucoup aimé aussi le premier texte sur l'insomnie du matin ! On imagine que l'auteur a bien connu ce qu'elle fait vivre à son personnage.
J'ai aussi écouté sur France Culture les poèmes Hymnes à la haine  : c'est très drôle, d'un humour décapant.
Dorothy Parker est un personnage hors norme, ça a été une découverte et un plaisir de lecture. J'ouvre aux ¾.
Rozenn
Ce n'est pas une découverte. Je me souvenais que j'aimais beaucoup. Mais je ne me souvenais pas des nouvelles, c'est étonnant.
J'aime beaucoup la méchanceté. On se reconnaît. J'ouvre aux ¾.
Annick L
J'ai adoré ce recueil de nouvelles et j'ai pris grand plaisir à les lire, voire à les relire. Quelle plume acérée pour camper ces petites scénettes d'une vie quotidienne assez triviale. Une vision désenchantée des relations amoureuses, du couple, de la famille bourgeoise conformiste et arrogante ("Le Petit Curtis", "Monsieur Durant"), mais aussi des rapports entre maîtres et domestiques, qu'ils soient noirs ou blancs ("La Jument", "Vêtir ceux qui sont nus"), du racisme ordinaire ("Arrangement en noir et blanc"). Une peinture de l'âme humaine et de la société qui fait fortement écho en nous, au-delà des détails liés à l'époque.
Lorsqu'elle met en scène, de façon théâtrale et directe, toutes les impasses de la vie à deux, Dorothy Parker (qui n'est pas franchement féministe !) n'épargne ni les femmes (les soumises comme l'ancienne starlette déchue, les amoureuses délaissées, mais aussi les épouses acariâtres, la bourgeoise cynique qui a adopté un enfant pour le dresser et le formater comme un petit animal de compagnie, etc.), ni les hommes (le plus souvent lâches, menteurs, cyniques et cruels), le plus horrible étant ce Monsieur Durant qui non seulement se débarrasse de sa secrétaire-maîtresse d'un jour comme d'un objet encombrant ("voilà une bonne chose de faite"), mais tyrannise aussi sa femme et ses enfants sans état d'âme. Des personnages caricaturaux, parfois, mais qui marquent l'esprit.
Et, lorsqu'on commence à se lasser de toutes ces histoires sentimentales lamentables, on découvre, vers la fin du recueil, quelques nouvelles qui dénoncent le mépris de classe, les inégalités sociales et raciales, des sujets plus graves.
Mais le plus remarquable chez cette auteure, c'est la diversité des formes empruntées : la première nouvelle commence par un échange entre deux commères sur un couple qui se sépare, puis l'on plonge de façon abrupte dans la vie de ce couple : "de quoi pouvaient bien parler les gens mariés quand ils se retrouvent seuls ensemble". Ennui, difficulté à communiquer, solitude à deux, c'est saisissant ! Solitude que l'on retrouve dans la deuxième nouvelle sous la forme d'un monologue désespéré, ou dans un autre, "New-York-Détroit" sous la forme d'un dialogue de sourds au téléphone… Variété des formes, variété des points de vue… : cette galerie de portraits s'anime ainsi au fil des pages, riche de ces personnages, très humains, tantôt ridicules, tantôt pathétiques, tantôt vraiment détestables. Un talent que Dorothy Parker a sûrement cultivé comme scénariste, mais qui supposait chez elle une formidable capacité d'observation de nos travers humains, de nos conformismes et de nos préjugés. J'ouvre en grand.
Claire
Je n'avais jamais entendu parler de cette auteure, ne suis apparemment pas seule, et suis donc ravie que Fanny, encouragée par Rozenn, nous l'ait fait connaître. Je rage de n'avoir pas vu la pièce Dorothy que Fanny a vue il y a quelques mois de et avec Zabou Breitman.
Je ne suis pas portée sur les nouvelles, mais j'apprécie que nous en lisions (nouvelles iraniennes l'an dernier, anglaises à Noël).
J'étais contente de rencontrer la plume de Benoîte Groult, deux fois préfacière et traductrice (j'ignorais qu'elle l'ait été, et les remarques ultérieures sur la traduction auront épargné ma lecture).
C'est l'univers des nouvelles qui m'a sidérée : constant et sans cesse renouvelé. Atroce et humoristique. Tragique et distanciée. Des tragi-comédies.
Je me suis procuré les 4 livres de nouvelles disponibles (Comme une valse, La vie à deux, Monsieur Durant et autres histoires de couple, Mauvaise journée demain) et celui de poésie (Hymnes à la haine), et ai "presque" tout lu. Je ne m'en suis pas lassée. C'est un autre plaisir que le roman vraiment. C'est du théâtre en permanence, avec une très grande variété de procédés.
Quand on sait son legs à Martin Luther King "Arrangement en noir et blanc" est un bel exemple de racisme subtil subtilement dénoncé, parfaitement d'actualité.
La nouvelle "Les sexes" est une magnifique scène de ménage, d'ailleurs entièrement en dialogue : jouissive !
Quant aux poèmes, ils sont tordants de haine.
Quel sens de la mise en scène et du détail qui tue, quelle cruauté ! J'ouvre aux ¾.
Laura
J'ai lu trois ouvrages de Dorothy Parker, dans l'ordre chronologique de ma lecture : Comme une valse, Hymnes à la haine, La vie à deux. Et j'ai complètement adoré ; si ce n'avait pas été le cas je n'en aurais pas lu autant… Alors, en premier lieu, j'adore le format "nouvelles", c'est ce qui m'a permis de ne pas être constamment coupée au cours de ma lecture, en plein milieu d'un chapitre. Et plus encore, ça m'a permis de me pousser à terminer les nouvelles dès que je les commençais. Mon aventure dans Parker a bien débuté dès la toute première nouvelle de Comme une valse : "Les heures blêmes". Je l'ai lue avant d'aller me coucher, et j'ai bien ri de cette fille qui se réveille à 4h du matin sans parvenir à se rendormir, se moquant d'elle-même, et ruminant ses pensées. Résultat, c'est moi qui me suis réveillée cette même nuit à 4h, et j'ai bien ri. Je ne pourrai pas me souvenir de toutes les nouvelles, mais certaines m'ont particulièrement marquée : je pense notamment à "La foudre narguée", où j'ai perçu la fin comme un véritable retournement de situation (diable ! finalement la plus détestable n'est pas celle que j'imaginais) ; "La grande blonde", qui était particulièrement atroce, et pourtant je ne lâchais pas le livre ; "Le petit Curtis", où je me dis que sincèrement, il y a des gens qui ne devraient pas avoir d'enfants, et qui ne devraient pas forcer le destin pour en avoir ; "Vêtir ceux qui sont nus", pour laquelle j'ai versé une larme ; "La jument", qui m'a a la fois fascinée et repoussée etc. De même, les articles qui closent Comme une valse sont d'un mordant extrême, particulièrement "Les bonnes âmes". Bref, voici un panel de mes préférés.
Donc la seconde raison de mon amour, c'est le style de Parker. Je qualifierais son style de piquant, direct et juste. En gros, chaque attaque est maîtrisée, ce qui rend les récits extrêmement vivants. Presque à chaque fois, j'ai eu la sensation que les personnages prenaient vraiment vie dans mon esprit.
L'écriture donc, mais aussi les thématiques, et le fait que le personnage principal soit (presque) toujours une femme, et une femme de tous les types. C'est fou, comme Parker parvient à construire un panel aussi large des caractères des femmes de son époque, qui sont encore valables aujourd'hui à mes yeux. J'ai la sensation que Parker a tout compris, tout perçu, tout cerné, et qu'elle décrit chaque comportement avec son lot d'ironie. C'est d'ailleurs l'ironie qui me semble la plus forte dans ses poèmes.
La seule chose que je regrette peut-être, c'est que l'autrice semble avoir trouvé son style assez rapidement, mais ne s'en est, du moins il me semble, jamais échappée : les deux recueils de nouvelles sont dans le même style d'écriture et de thématiques (l'amour, l'alcool, l'admiration, la déchéance), et même si le style poésie est nécessairement différent, la thématique ne m'étonne pas. Mais cela n'empêche en rien que ce soit un style que j'adore, avec des thématiques qui touchent toutes les couches sociales. Grand ouvert.

Denis 
Ne sachant rien de Dorothy Parker (même pas regardé le dossier, faute de temps), j'ai trouvé que la première nouvelle de La vie à deux commençait très fort et drôlement bien. Quelle ironie, quelle habileté dans les descriptions des petits gestes, de la direction des regards par exemple, des échanges de paroles maladroites... un régal. Et puis, le phénomène des anticipations croisées ("je ferai ce que tu veux - ah non, faisons ce que toi, tu veux, etc.") est très amusant. Dorothy utilise d'ailleurs plusieurs fois le procédé.
Puis vient la nouvelle "Le coup de téléphone", très habile dans l'analyse du débat intérieur, mais absolument pathétique. Cette femme est vraiment trop bête, non ?

Annick
Elles sont bêtement amoureuses. Et demeure le problème de la solitude. Plutôt s'accrocher que se retrouver seule.

Denis
Puis c'est "La grande blonde", tellement affligeante que je n'ai pas pu tout lire (la nouvelle est assez longue). Une nausée a commencé à me saisir après trois ou quatre nouvelles, je n'en pouvais plus. J'ai consulté la table des matières et j'ai choisi les plus courtes.

Laura
Les plus longues sont les mieux.

Denis
Heureusement, "Une soirée formidable" donne dans le burlesque et vient apporter une touche d'amusement.
Je ne vais pas tout passer en revue. Dorothy Parker a un talent incontestable, mais quelle noirceur ! Plusieurs de ces nouvelles m'ont évoqué la série Alfred Hitchcock Presents, qui met en scène la société américaine "middle class", mais en ajoutant une touche de gaîté et chez Hitchcock, il y a une tension, des chutes brutales, là on reste un peu frustré...

Catherine
Pas assez de morts !

Annick
Un petit coup de poison…

Denis
Ou, pour des portraits très fins des dames de la bonne société, j'ai pensé au film de Mankiewicz A Letter to Three Wives (Chaînes conjugales, 1949).
Tous ces portraits de femmes vachardes, hypocrites, racistes, imbues d'elles-mêmes ("est-ce que les femmes sont vraiment comme ça ?" me demandais-je), j'étais très curieux de voir comment ils seraient reçus dans le groupe : avec indignation ("mais non, les femmes ne sont pas comme ça", "ce sont des caricatures", etc.) ? De ce point de vue, j'ai trouvé la discussion passionnante, quelques personnes estimant que ces portraits pouvaient toucher des points sensibles. Bien sûr, les mêmes observations et questions s'appliquent aux hommes dépeints par Dorothy Parker, qui ne valent pas mieux, mais elles ne me révèlent rien que je ne sache déjà.
(après la séance) Dans un premier mouvement, j'ai ouvert à moitié, ne supportant pas tant de noirceur, mais a posteriori, ayant digéré, je reconnais le très grand talent de l'écrivaine et j'ouvre aux ¾.
Fanny       
J'avais été invitée à la pièce de Zabou Breitman, un seule-en-scène extra qui mêlait des nouvelles et la vie de l'auteure et où il était difficile de voir ce qui relevait de la fiction, comme si les deux univers étaient parallèles. J'ai eu envie d'en savoir plus et c'est pour cela que j'ai lu Comme une valse. J'ai lu pour ce soir en partie La vie à deux.
Je rejoins le bémol exprimé, quant au fait qu'on ne se rappelle pas les nouvelles ; mais quand vous les évoquez, tout me revient.
J'en lisais plusieurs à la suite, puis je laissais le livre, ce qui me donnait envie de continuer et à chaque fois, c'était le même plaisir. C'est à la fois un portrait d'une société et celui d'individus dans lesquels je ne me suis pas reconnue…
Le style est parfois très descriptif, sans fioriture ; par exemple Monsieur Durant pense à ce qu'il va trouver chez lui, par ordre d'importance : son dîner, ses enfants et sa femme…
(citation sa mère n'avait jamais su dire non)
Mais les critiques de l'auteure existent sans qu'elles soient explicites ; l'avortement n'est pas nommé non plus.
On est avec le personnage tout le temps, l'auteure nous embarque.
Je suis contente d'avoir entendu la diversité des avis. Car je me disais : tout le monde va aimer point final...
Séverine
(avis transmis deux semaines plus tard)
Mieux vaut tard que jamais pour Dorothy Parker… j'ai pris mon temps car pas facile de lire des nouvelles à la queue leu leu.
Alors le nom de Dorothy Parker m'évoquait le monde du cinéma. Je n'aurais pas pensé qu'elle était écrivaine. Ensuite, lire des nouvelles est rarement de mon initiative. J'ai un peu de mal avec les histoires qui ne me tiennent pas en haleine pendant un certain temps. Et bien, là je revois mon jugement et je le dis sans attendre : j'ouvre en GRAND Comme une valse. J'hésite à comparer ces textes à de petits bijoux finement ciselés ou à d'excellentes friandises ! À chaque fois, je me suis délectée (alors, ça sera plutôt des friandises) de ces histoires qui pour certaines auraient pu être vraiment montées sur scène, notamment en woman show… Les dialogues et les monologues sont savoureux. C'est à la fois drôle et pathétique, acide, méchant et plein d'empathie. Même si elle est une pince-sans-rire de premier ordre, je pense qu'elle doit sacrément les aimer ses personnages plein d'humanité et, en tout cas, elle sait nous les rendre sympathiques. Elle maîtrise à la perfection l'art de la nouvelle : tout y est, l'intrigue, les descriptions… et on ne reste pas sur sa faim. Je pense que je vais relire régulièrement les nouvelles de cet ouvrage. Je reste, en revanche, plus partagée sur les quatre articles proposés en fin de mon édition. Et comme j'ai tellement aimé Comme une valse, j'ai commandé La vie à deux (d'ailleurs Comme une valse aurait aussi pu porter ce titre car il y est tout de même souvent question de couples… et la valse, c'est un moment de vie à deux ) et Mauvaise journée demain.


Des remarques en fin de séance
sur l'échange à propos de nouvelles et la traduction

NOUVELLES : L'échange rapproché sur les nouvelles de Carter puis Parker..., nous a amenés à constater quelques différences. L'approche du récit diffère puisqu'autant de récits que de nouvelles, c'est une des raisons d'ailleurs de la mémoire narrative moins forte : on ne souvient pas d'un coup de toutes les histoires, on se les remémore quand on les évoque. C'est peut-être plus difficile de faire une synthèse de ses propres réactions car elles ont pu différer selon les nouvelles. Remarques à suivre avec d'autres nouvelles à programmer...

TRADUCTION : "Monsieur Durant" étant une nouvelle marquante, présente dans deux recueils, traduits à 60 ans de distance, nous lisons le premier paragraphe et sommes stupéfaits des différences entre les deux traductions. Reportons-nous au paragraphe anglais :

Traduction par Benoîte Groult, Denoël, 1960, puis 10/18
Il y avait bien dix jours que M. Durant ne s'était pas senti aussi heureux. Il se complut dans ce bien-être avec la sensation de s'allonger entre des draps frais et lisses. Dieu, avec qui M. Durant entretenait des rapports de bon voisinage, régnait de nouveau dans son paradis et chaque chose avait repris sa place dans l'univers.
Traduction Martial Doré, éd. Sillage, 2021
Cela faisait bien dix jours que M. Durant ne s'était pas senti l'esprit aussi léger. Il s'abandonna à la douce chaleur du calme retrouvé, comme il se serait voluptueusement emmitouflé dans un luxueux manteau neuf. Dieu pour Qui M. Durant éprouvait une bienveillante affection, était en Son paradis, et tout allait de nouveau pour le mieux dans le monde de M. Durant.
Not for some ten days had Mr. Durant known any such ease of mind. He gave himself up to it, wrapped himself, warm and soft, as in a new and an expensive cloak. God, for Whom Mr. Durant entertained a good-humored affection, was in His heaven, and all was again well with Mr. Durant's world.
 
Il se trouve que tout le début de la nouvelle est analysé par Xavier Lachazette, maître de conférences, dans le cadre de la préparation à l’agrégation d’anglais, qui fait une série de critiques à la traduction de Benoîte Groult et conclut que le jury d'agrégation lui attribuerait une sale note...
Sont appréciés :
- "Il y avait bien dix jours"
- "régnait de nouveau dans son paradis et chaque chose avait repris sa place" (mais il manque la fin de la phrase)
  Sont jugés désolants :
- "heureux" pour ease of mind
- "s'allonger entre des draps frais et lisses" (transposition lointaine où warm devient "frais" et cloak "draps")
- "rapports de bon voisinage" pour good-humored affection
- les majuscules attribuées à l'initiale du pronom et du déterminant possessif se référant à Dieu ne sont pas conservées
Il est vrai que la littérature et l'agrégation relèvent de plaisirs différents, mais Benoîte exagère quand même…

DOC AUTOUR DU LIVRE
Biographie
Dorothy Parker scénariste
Portée au théâtre
Ses livres

Biographie
Une anecdote ? Dorothy Parker assistait seule à une soirée où elle s’ennuyait ferme. Dès qu’une vague connaissance s’approchait d’elle en demandant "Comment allez-vous ? Que faites-vous ces temps-ci ?", elle répondait : "Je viens de tuer mon mari avec une hache et tout va très bien." Parce qu’elle disait ces mots avec l’intonation réservée aux badinages de salon, ses interlocuteurs souriaient en hochant la tête avant de s’éloigner, pas le moins du monde décontenancés (raconte Anne Karpf).

Sa vie est d'un romanesque ! En voici le début :
- 1893 : quatrième enfant de Jacob Henry Rothschild, riche tailleur juif, et d’Elizabeth, protestante d’origine écossaise. Dorothy grandira à New York, dans le très chic Upper West Side.
- 1897 : Décès de sa mère
- 1900 : Son père se remarie
- 1903 : Décès de sa belle-mère
- 1908 : Inscrite dans une école privée pour y poursuivre ses études, elle les arrête rapidement sans avoir obtenu le moindre diplôme.
- 1912 : Décès de son oncle, Martin Rothschild, dans le naufrage du Titanic.
- 1913 : Décès de son père, presque ruiné. Dorothy Parker doit subvenir seule à ses besoins. Elle devient pianiste pour une école de danse et commence à écrire.

Lisez la suite détaillée ici
jusqu'à sa mort en 1967 : pourquoi lègue-t-elle l’ensemble de ses droits d’auteur à Martin Luther King ?...

Et la toute fin :
- 2020 : L'urne funéraire contenant ses cendres qui avait passé plusieurs décennies, oubliée, au crématorium, puis dans un cabinet d'avocats, a rejoint enfin New York qu'elle considérait comme sa ville natale.

Trois articles la présentent sous un angle particulier
- "Dorothy Parker retrouvée à Manhattan", Nathalie Crom, Télérama, 8 juillet 2011 : elle appartenait au "Cercle vicieux", réuni à l'hôtel Algonquin, qui régnait dans les années 1920 sur la vie intellectuelle et mondaine new-yorkaise.
- "Dorothy Parker, la mort en sursis", François Forestier, Nouvel Obs, 23 octobre 2014 : un portrait savoureux et sans pitié de notre héroïne alcoolique, suicidaire et langue de vipère...
- "Style Parker", par Claire Devarrieux, Libération, 6 mai 1999.

Voici deux biographies
- L'extravagante Dorothy Parker de Dominique de Saint-Pern, Grasset, 1994
- Les traversées de Dorothy Parker de Camille Mancy, éd. Prisma, 2020, qui nous montrent sa binette entre deux âges :
                             
Et un site
Dorothy Parker Society, le site officiel de Dorothy Parker depuis 1998, présente par exemple :
- des interviews, par exemple "L'art de la fiction", interview par Marion Capon, The Paris Review, n°13, été 1956
- ses maisons : homes
- les lieux qu'elle fréquenta : haunts
- des tatouages inspirés de Dorothy (!) : tattoos

En vidéo ou audio
- Sur les traces de Dorothy en anglais : Remembering the Legacy of Dorothy Parker, vidéos : part I; 6 min et part II, 4 min.
- Bette Davies fit une lecture incroyable de Dorothy Parker, The Hollywood Palace : Dramatic Reader, 5 février 1966, vidéo, 7 min.
- La voix de Dorothy Parker dit ici "Afternoon
" et là "Perfect rose".

Le club dont elle fit partie...
Dorothy Parker fit partie de "L'Algonquin Round Table", un groupe d'écrivains et acteurs américains qui se réunissait dans les années 1920 à l'Hôtel Algonquin à Manhattan :
- un documentaire américain retrace l'histoire de ce groupe : The Ten-Year Lunch d'Aviva Slesin, récompensé par un Oscar en 1987 (en ligne ici).
- Mrs Parker et le Cercle vicieux, film de Alan Rudolph, sorti en 1994, en sélection officielle au festival de Cannes, présente la vie de Dorothy Parker dans le New York des années 1920 dans le cercle littéraire de la table ronde de l'Algonquin : bande annonce ici.
- Il a aussi inspiré
Le cercle des plumes assassines : une enquête de Dorothy Parker de J. J. Murphy, éd. Bakerstreet 2015, puis Folio policier 2016.

Dorothy Parker scénariste

Nous avons visionné, avant notre séance sur les nouvelles, L'Éventail de Lady Windermere d'Otto Preminger, dont elle a co-signé le scénario. Un éventail qui a une histoire :
- 1892 : L'Éventail de Lady Windermere (Lady Windermere's Fan), pièce d'Oscar Wilde ; créée à Paris en 1909 (texte en anglais ici, résumé en français là) : Lady Windermere et son mari, un jeune couple pépère, sont confrontés à une femme entre deux âges d'une grande beauté, réputée amorale...
- 1925 : adaptation par Lubitsch ; on peut voir ce film muet ici.
- 1949 : adaptation d'Otto Preminger (The Fan).

Quelques repères sur sa carrière
-
1934 : Dorothy Parker épouse Alan Campbell, acteur et écrivain ; ils emménagent à Hollywood et travaillent ensemble à des scénarios pour de grandes sociétés de production, notamment la Paramount. Elle participe à la création du premier syndicat de scénaristes, la Screen Writers Guild. Elle travaille essentiellement pour des films très commerciaux, pour lesquels elle est très bien payée.
- 1937 : On lui confie un scénario qui a déjà été ravaudé par 16 auteurs différents, qu'elle reprend avec son mari : c'est A star is born, avec Janet Gaynor et Fredric March (en ligne ici en vo) Le film sera nommé pour sept oscars. Il en obtiendra deux : "Meilleure histoire" et "Images Technicolor". C'est le triomphe pour le couple Parker.
- 1938 : Elle co-écrit le scénario de Sweetbearts de W. S. Van Dyke et de deux autres films grand public : The Cowboy and The Lady de H. C. Potter, et Trade Winds de Tay Garnett.
- 1941 : Elle travaille sur le scénario de Week-end for Three, de Irving Reis, et sur les dialogues de The Little Foxes de William Wyler.
- 1947 : Nouvelle nomination aux Oscars, dans la catégorie du meilleur scénario, avec le film Smash Up : The Story of a Woman de Stuart Heisler.
- 1949 : Écriture de son dernier scénario, pour un film d'Otto Preminger, The Fan, adaptation de la pièce d'Oscar Wilde L'Éventail de Lady Windermere. Dorothy Parker est mise sur la liste noire de la Motion Picture Association of America, qui depuis 1947 refuse d'employer des membres du Parti communiste ou des activistes de gauche...

Portée au théâtre

Dorothy Parker inspire en France les gens de théâtre - et cette liste n'est pas exhaustive... :
- 1982 : Quelle belle vie ! Quelle belle mort !, Théâtre 14, mise en scène Andréas Voutsinas
- 1999 : La Vie à deux, mise en scène Dominique Lardenois
- 2000 : Journal d'une new-yorkaise, mise en scène Hélène Darche, Théâtre de l'Opprimé
- 2004 : Assez de corde pour se pendre, mise en scène Hélène Dedryvère, Toulouse
-
2006 : Hôtel Dorothy Parker, Théâtre de Déchargeurs, puis théâtre La Bruyère, mise en scène Rachel Salik
- 2008 : Mauvaise journée demain, mise en scène Alain Prioul
- 2010 : DesAmours, mise en scène Cassandre Vittu de Kerraoul
- 2013 : Dorothy Parker, mise en scène Arnaud Selignac, avec Natalia Dontcheva, Théâtre du Lucernaire. Extrait et interview ici.
- 2017 : Night and Day, mise en scène Gaëlle Lebert. Détails ici.
- 2021 :
La valse, Marie Strehaiano, Théâtre du Passeur au Mans (trois nouvelles)
- 2021 : Dorothy,
écrit, mis en scène et interprété par Zabou Breitman, au Théâtre du Chêne noir à Avignon et au Théâtre de la Porte Saint-Martin. Beaucoup de presse sur ce spectacle : voir par exemple dans 28 minutes. Le dossier de la pièce. Interview dans La Terrasse. Extrait ici. Avec Léa Salamé sur France Inter ici.

Jean-Luc Seigle publié Excusez-moi pour la poussière : le testament joyeux de Dorothy Parker, pièce en huit tableaux, Flammarion, 2016. Pièce jouée en 2013 et 2017.

Autre scène que celle du théâtre, celle de la chanson : en 1987, Prince chante la "Ballad of Dorothy Parker" dans son album Sign O’ The Times : l’histoire d’un flirt avec Dorothy Parker, serveuse rencontrée sur un boulevard... (à écouter en studio ou live).

Ses livres

     › ŒUVRES EN ANGLAIS
•Nouvelles
- Complete Stories, Londres, Penguin Books, 1995.

•Poésie
- Complete Poems, Londres, Penguin Books, 1999.
- Not Much Fun : the Lost Poems of Dorothy Parker, New York, Scribner, 2001.

•Recueils d'articles
- Complete Broadway, 1918-1923, Bloomington, iUniverse, 2014.
- Constant Reader, New York, Viking Press, 1970 (recueil d'articles de critique littéraire parus dans le New Yorker entre 1927 et 1933)

•Pièces de théâtre
- Close Harmony, avec Elmer Rice), New York, S. French, 1929.
- The Ladies of the Corridor, avec Arnaud d'Usseau, New York, S. French, 1954.
- The Coast of Illyria, avec Ross Evans, Iowa City, University of Iowa Press, 1990.


     ŒUVRES TRADUITES (7 livres, 6 traducteurs : Benoîte Groult, Michèle Valencia, Martial Doré, Patrick Reumaux, Hélène Fillières)
La vie à deux, préface et traduction par Benoîte Groult, publié d'abord sous le titre Comme ils sont (Here We Are), Denoël, 1960 ; réédition sous le titre La Vie à deux, Union générale d'éditions, 1983 ; réédition 10/18, 2011, 256 p. (16 nouvelles)
- Quel dommage ! (publié dans un autre livre)
- Le coup de téléphone
- La grande blonde
- Quelle soirée formidable !
- Le merveilleux Vieux Monsieur
- Monsieur Durant (publié dans un autre livre)
- Le calme avant la tempête
- Le petit Curtis
- La vie à deux
- Vêtir ceux qui sont nus
- New York - Detroit
- Les sexes
- La jument
- Sentimentalité
- Arrangement en noir et blanc
- Les bonnes amies

Comme une valse, trad. Michèle Valencia, 10/18, 1992, 288 p.
(19 nouvelles et 4 articles)

- Une question de standing
- Encore un tout petit
- Mrs Hofstadter, qui habite Joséphine
- Street
- La valse
- Soldats de la République
- Le dernier thé
- Journal d'une New-Yorkaise
- Cousin Larry
- Haute couture
- Lolita
- La jolie permission
- La gloire en plein jour
- Le cœur qui fond
- Je ne vis que par tes visites
- La foudre narguée
- L'héritage de Whistler
- La jeune femme en dentelle verte
- Dialogue à trois heures du matin

Mauvaise journée demain, trad. Hélène Fillières*, éd. Christian Bourgois, 2010, 192 p. (16 nouvelles)
- Quel joli petit tableau (publié dans un autre livre)
- La jarretière
- La chape de compliments
- Une journée horrible, demain
- Récit de voyage
- Retour à la maison
- Oh ! Il est charmant
- Miss Carrington et Miss Crane
- Une femme particulière
- Une jeune femme en dentelle verte
- Conversation à trois heures du matin
- Le berceau de la civilisation
- Mais celui à ma droite
- Conseils à la petite Peyron
- Le dîner de corbeau
- Le jeu
Monsieur Durant et autres histoires de couple, trad. Martial Doré, éd. Sillage, 2021, 80 p. (3 nouvelles précédées de repères bio puis bibliographiques)
- Monsieur Durant (publié aussi dans le recueil La vie à deux)

- Quel dommage ! (publié aussi dans le recueil La vie à deux)

- Un si joli petit tableau (publié aussi dans le recueil Mauvaise journée demain)

Par ailleurs, sont aussi publiés :
De poèmes : Hymnes à la haine, préface de Benoîte Groult, trad. Patrick Reumaux, Phébus, coll. Libretto, 2010, 112 p.
Des articles : Articles et critiques, trad. Hélène Fillières*, éd. Christian Bourgois, 2002, 294 p.

                      

*L'actrice Hélène Fillières évoque ses traductions de deux livres de Dorothy Parker dans une 'interview : "L'attrape-cœurs", par Olivier Nicklaus, Les Inrocks, 27 février 2001.


Nos cotes d'amour, de l'enthousiasme au rejet :
                                        
à la folie
grand ouvert
beaucoup
¾ ouvert
moyennement
à moitié
un peu
ouvert ¼
pas du tout
fermé !

 

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