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 "C'est encore une fois les vacances. 
        Encore une fois les routes d'été. Encore une fois des églises 
        à visiter. Encore une fois dix heures et demie du soir en été. 
        Des Goya à voir. Des orages. Des nuits sans sommeil. Et la chaleur. | Marguerite Duras | |||||||||||||||||
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Margot (avis transmis)
        Que votre soirée soit douce et fructueuse en compagnie de Marguerite 
        Duras dont j'ai tant aimé ce livre découvert grâce 
        à vous. Aimé car lu sur les marches de l'église Saint-Blaise 
        au soleil et dans le bleu du ciel de ces longs jours de l'enfermement. 
        Aimé car le temps de ces jours était le temps du livre de 
        Marguerite Duras, suspendu dans cet hôtel et cet orage qui n'en 
        finissait plus d'éclater et ce crime de durer. Aimé pour 
        l'espace intérieur que cet immense écrivain ouvre tout au 
        long de ces pages, là, entre l'hôtel et le ciel menaçant, 
        le long des balcons, coursives suspendues où se tient un homme 
        abandonné, une femme qui cesse d'aimer. Aimé pour cette 
        immense liberté de voler au secours d'un inconnu ; lui de 
        choisir de mourir dans les blés sous le soleil ardent ; elle 
        de se détacher d'un scénario qui se répète 
        à l'infini. Aimé pour cette écriture si Duras, de 
        phrases inimitables, comme une autre langue qui viendrait de si loin étirer 
        le temps et l'espace du dedans. J'ouvre en grand. 
        Séverine 
        Le style est un peu surprenant de prime abord, malgré de belles 
        images (pluie d'orage, lumières, champs de blé, chaleur
). 
        Une certaine tendance à distordre la langue, ou dans l'emploi de 
        certains mots, phrases sans verbes, inversions, menant à de possible 
        confusions dans le suivi de la narration. La lecture en est néanmoins 
        prenante assez rapidement. L'histoire nous offre un intéressant 
        parallélisme entre le déchaînement des éléments 
        et celui des sentiments, des émotions, des états de conscience 
        (alcool, sommeil/veille). Étonnants états des personnages 
        en rupture de vies, passions meurtrières ou suicidaires
 Le 
        personnage principal, Maria, est à la fois fascinant et irritant. 
        Son empathie pour le criminel peut paraître étonnante, puis 
        son brutal détachement vis-à-vis de ce dernier. Le voit-elle 
        comme une possible planche de salut, échappatoire à l'humiliation, 
        possible revanche ? Son rapport à son mari, à sa fille 
        Judith, faite d'affection et de désintérêt, à 
        Claire, fait de séduction et de rivalité. Elle n'est pas 
        très sympathique au final. Émouvante parfois. Son rapport 
        à l'alcool est excessif. Mon plaisir de lecture a été 
        moyen. Ouvert à demi.
        Anne-Marie 
 
        
        Je n'aime pas vraiment le style Marguerite Duras, sec, brutal, à 
        la fois pauvre et maniéré. L'histoire pourrait être 
        intéressante sans ce style presque volontairement maladroit, artificiel. 
        L'évocation de la chaleur suffocante qui va crescendo est bien 
        rendue, elle va de pair avec l'intensité dramatique grandissante 
        du texte, on se demande si l'inexorable va se produire, si ce que redoute 
        et attend Maria va arriver. On sent son désespoir grandissant dans 
        sa dénégation, dans la manière dont elle boit de 
        plus en plus, en attendant le soir. L'épisode du meurtrier qu'elle 
        aide à s'évader dans sa voiture est une tentative de détournement 
        de la tension, pour Maria, on ne sait pas ce qu'elle a cherché 
        à faire, c'est un peu curieux. (Le personnage du meurtrier manque 
        un peu de consistance, il est abstrait). Peut-être Maria a-t-elle 
        fait le parallèle entre les amants surpris par le meurtrier, et 
        l'histoire qui se noue entre son mari et Claire. Mais on voit bien qu'elle 
        n'a pas l'intention d'empêcher la conclusion de l'idylle entre son 
        mari et son amie, elle y est résignée, elle voudrait même 
        que ce soit déjà fait. Le récit est prenant et en 
        même temps agaçant, le temps s'étire, le style est 
        pauvre, on s'achemine vers la fin trop lentement. Une fois le livre achevé, 
        je m'en veux d'avoir été prise par l'intensité dramatique, 
        je trouve ce livre à la fois mal écrit et manipulatoire, 
        car toute cette histoire est totalement improbable, rien n'est vraisemblable, 
        ni l'épisode du meurtre, ni la résignation de Maria qui 
        va donner son mari à son amie. Je l'ouvre au quart.
        Christine 
         
        Je suis surprise par ces ressentis. J'ai été tellement totalement 
        séduite pour ma part par Duras. J'ai été transportée 
        par le livre. J'ai aimé l'histoire de ce trio avec en parallèle 
        l'histoire de cet homme qui a tué sa femme et son amant. J'ai beaucoup 
        aimé le titre qui m'intriguait. Dix heures et demie le soir, c'est 
        l'heure précise à laquelle Maria voit son mari embrasser 
        Claire, son amie et le moment où elle va découvrir sur un 
        toit l'assassin que tout le monde recherche, à qui elle va s'identifier 
        et qu'elle va aider. Le tout dans un décor totalement cinématographique. 
        C'est un livre que j'ai énormément aimé. J'ai aimé 
        le style, les phrases bancales qui veulent dire beaucoup de choses. J'ai 
        appris que Duras réécrivait pour détruire ses phrases. 
        Au contraire d'Anne-Marie, j'ai compris le personnage de Maria, ses failles. 
        Elle boit parce qu'elle ne va pas bien. Elle attend ce qui semble inéluctable. 
        Il y a quelque chose qui se passe et sonnera la fin de son couple. J'ouvre 
        en très grand. 
        Audrey  
         
        Je suis très heureuse de l'avoir lu. Depuis longtemps, je me dis 
        que certes mes lectures m'apportent un plaisir intellectuel indéniable, 
        mais ne me transportent pas. J'avais oublié Duras. Je l'ai adoré, 
        j'ai été transportée. J'avais envie que cela ne s'arrête 
        pas. C'est l'uvre d'une auteure que je trouve géniale et 
        j'ai quand même le sentiment que cela s'inscrit dans une époque. 
        Duras invente une forme de littérature qui n'existait pas avant 
        elle. Elle utilise une langue très épurée. Je l'imagine 
        très bien réécrire, déconstruire... pour moi, 
        sa langue est d'une extrême précision. L'histoire me touche, 
        celle de la fin d'un amour, fin d'une histoire que je trouve haletante. 
        J'avais l'impression de lire un long poème où tout était 
        sublime. On ressent à la fois quelque chose de sensuel et en même 
        temps douloureux, désespéré ; on sent un malaise... 
        Cette femme qui boit a quelque chose de désespéré. 
        Elle renonce ; elle est dans une phase de fin d'une histoire, et 
        vit dans une certaine langueur. Cela m'a rappelé Moderato 
        cantabile, l'histoire de deux personnes qui se retrouvent autour 
        d'une enquête dans un café et leurs histoires se fusionnent. 
        Et dans ce roman-ci, il y a un peu de ça. On est en train de lire 
        quelque chose et parfois on n'est plus avec les personnages avec lesquels 
        on était censé être. Ce qui souligne la maîtrise 
        parfaite de l'auteur. J'ouvre en très grand.
        Anne  
         
        Ce n'est pas un polar, c'est un livre poétique, et pourtant Marguerite 
        Duras utilise avec une grande habileté le suspense. Elle associe 
        des techniques littéraires différentes pour exprimer avec 
        intensité l'univers émotionnel d'une femme dans l'errance 
        affective. Elle utilise des superpositions de plans comme au cinéma, 
        des descriptions (parfois confuses) de paysages, de lieux, des atmosphères, 
        tandis qu'elle nous laisse imaginer les personnages qui sont définis 
        essentiellement par leurs actions. Ils sont beaux, antipathiques, et ils 
        sont la plupart du temps des "formes" ou des fonctions : 
        les policiers, les serveurs, la directrice de l'hôtel... Il y a 
        un enfant, Judith, laissé pour compte, et cela ne m'a pas plu, 
        mais cette place traduit ce que Marguerite Duras cherche à dire 
        sur l'abandon. J'ai suivi avec beaucoup de plaisir cette langoureuse et 
        tragique rêverie de Maria. J'ai pensé longtemps que Rodrigo 
        Paestra, le meurtrier, n'était qu'une invention de son esprit dans 
        le but de pouvoir supporter l'abandon dont elle est victime, par son mari 
        et son amie Claire qui découvrent, sous ses yeux, qu'ils s'aiment 
        et qui ne le lui cachent pas. Pourtant dans les mots ils se montrent réconfortants, 
        patients. Ils sont faux, et c'est ce sur quoi l'histoire se termine : 
        la vie semble chanter mais elle porte un masque. Un polar, oui, un meurtre, 
        oui, et il semble qu'il s'agisse au fond de l'assassinat de l'amour de 
        Maria, de son couple. Elle est trompée et peut-être se sent-elle 
        être aussi ce meurtrier qui a tué par passion et par jalousie. 
        Au fond voudrait-elle tuer ? Sans doute, mais elle ne le peut pas, 
        et elle admire Rodrigo qui l'a fait. Elle est aussi celle qui est meurtrie, 
        trahie, et son corps sexué disparaît tandis que ceux des 
        deux amants deviennent omniprésents. Soudés. Aveuglants. 
        Et elle est exclue de ce couple, comme Pedro l'est de la société. 
        Aussi cherche-t-elle cet homme dont elle se sent proche et qu'elle voit 
        accroché aux toits sous la pluie. Un supplicié. C'est ce 
        qu'elle se sent être. Sans plus aucune protection, comme Rodrigo 
        agressé par la pluie, accroché aux toits comme aux pans 
        d'une mère qui ne répond plus, ne protège plus. Morte. 
        Tout s'effondre, c'est une tragédie et il ne reste plus que de 
        boire et de boire encore. Tout se liquéfie. Marguerite Duras décrit 
        de façon remarquable le naufrage de cette femme, son alcoolisme, 
        son addiction, son errance dans des lieux étranges que sont les 
        couloirs (les boyaux ? Et très justement évoqué 
        par Nathalie, un enfer) d'un hôtel pris d'assaut par les touristes 
        qui échappent au déluge. Drôle d'embarcation
 
        Drôle d'arche de Noé
 Et puis il y a la hantise d'un 
        orage qui n'en finit jamais d'éclater et cette chaleur étouffante 
        et harassante pour décrire une magnifique situation dramatique 
        écrite avec des tournures de phrases déroutantes, pourtant 
        créées avec une simplicité de moyen étonnante. 
        J'ai aimé, j'ai senti son travail sur les mots, sur les phrases, 
        sa façon de les simplifier à l'extrême et de déconstruire 
        le langage académique pour construire un langage qui montre l'essentiel 
        des émotions, des désirs contradictoires. J'ouvre en très 
        grand.
        Katherine  
         
        Cela ne m'était jamais arrivé dans ce groupe. C'est un livre 
        qui m'a laissée indifférente. L'écriture m'a beaucoup 
        intéressée, avec des phrases suggestives, le style chargé 
        de sens, mais l'histoire ne m'a pas intéressée. L'histoire 
        est racontée de façon assez froide, assez journalistique, 
        ce qui ne m'a pas permis d'y adhérer. Le personnage de Maria est 
        plus ou moins indifférent. Elle est indifférente au couple 
        de son mari et amie qui se fait devant elle et qu'elle laisse faire. Même 
        dans l'action elle déçoit. Elle découvre l'homme 
        sur le toit, puis plus tard elle le découvre mort. Mais rien... 
        Je n'ai pas été transportée par l'histoire et le 
        style ne suffisait pas. Je ne me souviens de rien d'un précédent 
        roman que j'ai lu de Duras. Je ne la recommande pas spécialement. 
        J'ouvre au quart. 
        Nathalie   
        
        J'ai beaucoup aimé ce livre. Cela faisait très longtemps 
        que je n'avais pas relu du Duras. J'en ai beaucoup lu à une certaine 
        époque et lorsque je l'avais découverte, j'avais été 
        très séduite par son écriture. C'est une écriture 
        lancinante, incantatoire, une musique qui n'appartient qu'à elle. 
        Et en lisant ce roman que je n'avais jamais lu, j'ai adoré retrouver 
        cette écriture qui lui est si personnelle. On m'aurait caché 
        le nom de l'auteur, j'aurais tout de suite su que c'était elle. 
        Pour moi, le style est remarquable et unique. Quant à l'histoire, 
        je la trouve très riche. Elle semble être racontée 
        de façon factuelle, et donc froide comme dit Katherine. Et pourtant, 
        on ressent les émotions de Maria qu'elle refoule le plus possible 
        loin d'elle. Certes elle se réfugie dans l'alcool devenuà 
        ce stade une addiction extrêmement bien décrite, qui a donc 
        commencé bien avant l'amour qu'elle voit naître entre son 
        mari et son amie. Cette histoire n'est pas étrangère à 
        Duras qui l'a vécue elle-même en inversé. Ainsi alors 
        qu'elle était mariée avec Robert 
        Antelme, elle va connaître une histoire d'amour avec Dyonis 
        Mascolo qui sera ami du couple. Il participera d'ailleurs au rapatriement 
        d'Antelme qui agonise à Dachau. Duras quittera le premier pour 
        le second, mais tout le monde restera en très bons termes. Quoiqu'il 
        arrive, comme dans le roman, ce sont des gens qui s'aiment. J'ai fait 
        un lien entre l'hôtel où s'amassent tous ces voyageurs durant 
        l'orage, où la plus grande partie de cette histoire a lieu, avec 
        l'enfer de Dante, d'autant qu'on se perd dans cet hôtel circulaire. 
        Ce roman qui se passe sur 24 heures est extrêmement bien construit. 
        Le dedans des personnages est exprimé dans le climat extérieur 
        (chaleur qui empêche de respirer comme le chagrin peut le faire, 
        pluie diluvienne telle des larmes non retenues, orage comme la colère, 
        puis le soleil revient avec l'acceptation). Et le parallèle avec 
        l'assassin de sa femme et de son mari qui est à la fois la même 
        histoire traversée par l'héroïne mais avec un dénouement 
        tout autre, comme un fantasme de sa propre violence qu'elle retient tellement 
        en elle qu'elle la retourne contre elle au point de sembler ne plus rien 
        ressentir que la soif, m'a beaucoup séduite. J'ouvre aux ¾.
         Monique M
        Ce roman est magnifique. Merci à celle ou celui qui l'a recommandé.
        Dès les premières pages, on est pris par le climat étrange 
        et le suspense qui se prolongent tout au long du récit. Quelque 
        chose de terrible va advenir. On ne sait quoi, où, comment. La 
        prise du meurtrier par la police à dix heures et demie de ce soir 
        étrange où tout est suspendu ? Peut-être, on ne sait. 
        L'écriture poétique, lancinante, fluide de Marguerite Duras 
        nous emmène toujours plus loin.
        Admirable description du lieu : "Dans 
        le café déjà, l'ombre a gagné. Au fond, sur 
        le bar mouillé des bougies sont allumées et leur lumière 
        se mélange, jaune, à celle, bleutée du jour mourant". 
        Maria boit ses manzanillas, l'orage gronde, les averses se succèdent.
        Admirable description de l'orage "qui 
        court depuis cinq heures du soir, crevant par-ci, par-là, se trouant 
        d'éclaircies, se reformant encore. Jusqu'à épuisement."
        Douceur de la relation entre Maria et sa fille "Maria 
        s'allonge auprès de Judith endormie, la sienne, la forme sienne 
        parmi toutes les autres d'enfants du couloir. Elle l'embrasse doucement 
        sur les cheveux - Ma vie, dit-elle"
        Idée très belle de la complicité entre Maria et Rodrigo 
        Paestra. Tous deux trahis, tous deux solitaires, tous deux en attente 
        de ce qui va advenir.
        Les trois tensions simultanées que sont : l'orage au ciel zébré 
        d'éclairs, l'assassin sur le toit qui attend que "passe 
        la durée infernale de la nuit", la montée 
        foudroyante du désir entre Claire et Pierre. Trois tensions qui 
        s'enchevêtrent et dont on ne sait d'où surgira l'issue.
        L'impuissance de Maria, observatrice muette des événements. 
        Une Maria en errance qui tient le fil immatériel de ce récit, 
        décide d'un acte fou, l'évasion du meurtrier, le seul qu'elle 
        comprenne profondément peut-être. Une Maria qui a la prescience 
        de ce qui va advenir. Il faut l'écriture de Duras pour écrire 
        un tel récit, ces allers et retours permanents des mouvements secrets 
        de l'âme, ce mélange de matérialité et des 
        émotions les plus subtiles
        Il y a aussi l'ombre de ce qui fut, Verone ; les sifflements et les rondes 
        des policiers dans la rue ; la main de Pierre sur le corps de Claire dans 
        la lumière livide des éclairs ; la forme, enveloppée 
        de son linceul, de Rodrigo Paestra agrippé à la cheminée 
        ; et elle Maria sur le balcon et partout à la fois. Ce chapitre 
        trois est fantastique.
        Pour toutes ces raisons, j'ai adoré ce livre et l'ouvre en grand.
        
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