La famille de David Garnett

On ne sait trop par où commencer : son arrière-grand-père, le révérend Richard Garnett, linguiste et philologue, fut conservateur adjoint à la Bibliothèque Nationale de Great Russell Street à Londres (British Museum) et un grand chercheur.

Son grand-père, Richard (1835-1906), fut l'auteur de nombreux ouvrages critiques et de The Twilight of the Gods and other Tales (1888), loué par Swinburne, Wilde et T. E. Lawrence : fables païennes ridiculisant les conventions, dans le style de Lucien. Il fut également conservateur à la Bibliothèque nationale, commença la rédaction du célèbre catalogue (publié en 1905) et inventa même un nouveau système permettant de transporter les étagères avec leurs livres ! Il y passa quarante-huit ans de sa vie, dont dix pendant lesquels il habita avec sa famille dans l'enceinte même de ce temple circulaire de la recherche littéraire (le journal intime de sa fille Olive a été publié on deux volumes, 1989 et 1993).

Son père, Edward (voir Roger dans No Love, 1929 et Beany Eye, 1935), également auteur de nombreux ouvrages, fut critique littéraire et pendant près de cinquante ans lecteur pour plusieurs maisons d'édition (dont Fisher Unwin, Duckworth et Cape). Grand découvreur de talents littéraires qui devinrent ses amis, qu'il influença et dont les noms pourraient constituer une véritable anthologie littéraire : Yeats, Conrad (qui lui dédicaça Almayer's Folly en l'appelant "my first reader"), Ford Madox Ford (qui le surnomma "le pape non conformiste de la littérature"), E. M. Förster, John Galsworthy (qui s'en inspira pour son personnage de Bosinney dans A Man of Property et que Garnett obligea à réécrire totalement The Island Pharisees à deux reprises), H. E. Bates, Henry Green, W. H. Hudson, H. G. Wells, D. H. Lawrence (Edward sera critiqué, plus tard, pour lui avoir demandé de supprimer des passages de Sons and Lovers qui auraient empêché Duckworth de publier le roman) et T. E. Lawrence.

Sa mère, Constance (Alice dans No Love), féministe, rationaliste et linguiste autodidacte, eut une influence considérable en étant la première à traduire en anglais la plupart des grands écrivains russes et à faire connaître Tolstoï, Tourgueniev, Gogol, Dostoïevski et Tchekhov au public britannique (71 volumes). Elle alla, seule, en Russie avant la révolution et rencontra Tolstoï, puis avec David, âgé de douze ans, pendant la guerre russo-japonaise. George Bernard Shaw lui avait proposé de l'épouser et elle eut une liaison avec le révolutionnaire exilé Stepniak. En 1907, pendant la convention du parti social-démocrate à Londres, elle rencontra Trotski, Staline et Lénine et refusa de leur servir d'interprète. D. H. Lawrence lui demandait son avis en lui confiant ses manuscrits et Edward, hésitant à cause de la qualité inégale de l'anglais de Conrad, lui fit lire Almayer's Folly et c'est elle qui conseilla la publication de ce premier roman qui allait être suivi de tant de chefs-d'œuvre.

François Gallix
extrait de la préface de Un homme au zoo de David Garnett


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