Kazuo Ishiguro
Un artiste du monde flottant

Nous avons lu ce livre en novembre 2004.
Nous lirons Les vestiges du jour en mai 2018.

Katell
J'ai adoré le titre, plein de mystère, qui m'a poussée à lire le livre il y a quelque temps déjà. Mais curieusement, le souvenir du livre s'estompe. Alors sans faire d'anti-sèche, voici les impressions que j'ai retenues. J'ai bien aimé que le héros et narrateur soit un homme vieillissant. Curieusement, les vieux personnages sont peu évoqués dans la littérature en général. Un personnage à la retraite, qui évoque son passé et qui tente de comprendre les mécanismes et les répercutions de ses actions. Je suis trop peu calée en histoire japonaise pour comprendre réellement les enjeux, même si j'en ai une vague idée. J'ai aussi apprécié l'évocation de la maison et surtout une très jolie scène où il rend visite à un vieux compagnon (je ne sais plus qui c'est) avec son infirmière. Il y a dans le guide du Japon de Claire une page consacrée aux maisons traditionnelles, avec une photo et un fusuma (porte coulissante) ouvert sur un jardin. C'est tout à fait la lumière et le style de cette scène. Sinon, ce livre évoque très bien (bien qu'il soit écrit en anglais) le Japon tel qu'on se l'imagine : la scène de rencontre pour le mariage de sa fille, les femmes et leur petit rire derrière leurs doigts (hein Liliane ?). Cependant, j'en garde un souvenir mitigé. Je n'ai pas été passionnée, plutôt intriguée par les méandres de sa conscience.
Voilà, il est 19 h 57, vous vous réunissez toutes et tous et je suis seule chez moi dans ma banlieue, alors je vais aller rejoindre Haruki Murakami (La Course au mouton sauvage) pour être dans le mouv' !
Marie-Christine
Je ne sais que penser de ce livre. J'ai parfois été sous le charme, parfois perdue (des notions historiques me manquaient).
Rozenn
Je suis d'accord avec les deux avis précédents. Je l'ai lu l'an dernier sans y comprendre grand chose. Je pense qu'il faut connaître l'histoire du Japon pour entrer dans ce livre. J'étais contente à l'idée de le relire mais je ne l'ai pas retrouvé. J'en garde un souvenir intéressé, j'attends vos avis avec impatience.
Christine
Je l'ai lu il y a quelques années avec d'autres du même auteur, Les Vestiges du jour, sur l'Angleterre et celui-ci sur le Japon. C'est fade, c'est comme les campus writers, David Lodge, Allison Lurie, il n'y a pas grand'chose qui accroche. Ce n'est pas profond, on reste en surface. C'est habile, on est forcément intéressé, mais il n'en reste rien ; il y a un côté guide de voyage du Japon, le Japon à la portée de tous. Les Vestiges du jour m'avait plus intéressée.
Béatrice
C'est un monde "cocotte minute", avec ce côté très bridé. On ressent une incapacité à voir ce qui s'est passé avant et de le dire. C'est le Japon qui n'a pas pu faire son travail de mémoire après la guerre, la destruction des lieux, la reconstruction. J'ai aimé les rapports entre eux des membres de la famille. J'ai eu plaisir à lire ce livre, mais pas envie de le faire partager.
Claire
Je l'ai lu sans que le livre ne me tombe des mains... Mais quel est le sujet de ce livre ? L'après-guerre ? L'art ? Oui, oui. J'ai eu l'impression d'un certain bavardage. Les adresses au lecteur sont accrochantes et j'aime bien les va-et-vient entre les différents temps. J'ai adoré les dialogues pleins de violence retenus notamment entre le père et ses filles ; et l'histoire du saké promis par le grand-père au petit-fils que la mère refuse de donner, le moment dramatique de la lettre demandée par un ancien élève, le contraste entre la parole franche avec certains interlocuteurs (Matsuda) et codée avec d'autres (ses filles), les va-et-vient entre les différents temps, le rapport maître/disciple : quelle nostalgie pédagogique ! Le livre ne m'est jamais tombé des mains, mais les qualités sont éparses, je me demande si ce livre mérite mon enthousiasme…
Dawn
C'est un livre qui m'a beaucoup marquée. Les trois fois où je l'ai lu. Il y a une ambiance très prenante, avec une première impression  "qu'est-ce que c'est beau, je suis complètement dedans", comparable à un polar. Le personnage principal représente l'orgueil absolu ; c'est un vieux con. Il n'y a qu'un homme qui aurait pu écrire ce livre. Le thème des trois livres est la guerre (celui-ci, Les Vestiges du jour, et Lumière pâle sur les collines). C'est un livre insaisissable. Qu'est-ce qu'ils sont anglais ces Japonais !
Monique
Je ne suis pas emballée. Voici quelqu'un qui vit dans un pays, originaire d'un autre pays et qui tente de nous raconter son pays d'origine, alors qu'il est déjà ailleurs... problématique déjà posée dans beaucoup de livres japonais. C'est un procédé de l'auteur, démonstration d'une idée avec création de personnages pour servir cette idée : le personnage principal est un vieillard qui se retourne sur sa vie, très utilisé dans de nombreux romans japonais. Aucune idée nouvelle sur art et politique, art engagé, déjà débattu par Sartre. Il s'agit du bouleversement du Japon, et surtout de l'idée que les Japonais avaient de leur pays après la défaite, pleine de culpabilité. L'artiste du livre est incapable de penser à la guerre et à ses activités pendant cette période. Il parvient à dire qu'il s'est trompé pour favoriser le mariage de sa fille. Le seul moment intéressant du livre est à la fin, quand la fille aînée dit ne pas se souvenir d'avoir conseillé à son père de reconnaître ses erreurs. La question reste ouverte : est-ce le vieil homme qui a imaginé tout cela ? Sinon, rien de nouveau dans ce livre ; c'est un écrivain qui a trouvé un thème qui pouvait plaire. Ivre de femmes et de peinture, voilà un film qui traite du même thème, mais tellement plus extraordinaire et original.
Jacqueline
J'ai lu Les Vestiges du jour il y a 8 ans et j'avais beaucoup aimé cette ambiance de guerre, remarquable, cette histoire d'amour platonique. Un Artiste du monde flottant est lent, pesant ; c'est une grande déception, le style des Vestiges ne passe pas du tout dans Un Artiste du monde flottant, on ne sent jamais le personnage comme un peintre. Le déchirement par la guerre on l'a déjà trouvé, beaucoup plus fort, dans d'autres livres comme ceux de K. Oé. Tout tombe à plat.
Brigitte
Les Vestiges du jour, on ne pouvait pas croire que c'était écrit par un Anglais… Ici, le thème est pour moi la transmission des générations : narrateur-gendre-petit-fils. Ce n'est pas un vieux con, hypocrite, malhonnête. C'est un homme qui a vécu à son époque, en contradiction avec son père. Son gendre est dans l'époque actuelle. Heureusement qu'il y a la politesse, sinon les relations entre eux seraient impossibles. Le petit-fils est doué pour le dessin, attiré par la culture américaine, il sera encore quelqu'un d'autre. On voit l'incompréhension entre les trois générations : ou on est à distance du monde dans lequel on vit, ou on rentre dedans et on fait des conneries.
Françoise
J'ai aimé ce livre et je ne l'ai pas lâché. Je l'ai lu en anglais, donc en langue originale, et j'ai été frappée que cette écriture anglaise toute d'" understatement ", si caractéristique, colle parfaitement au propos et à la façon d'être japonaise (Dawn qui vient l'autre côté de la Manche est d'accord, et il est intéressant de constater que seule elle et moi pour l'instant ouvrons le livre complètement). Je ne suis pas d'accord avec Monique, le fait que l'auteur ait reçu une éducation britannique lui donne une distance par rapport à son pays d'origine et lui permet de nous faire percevoir et mieux comprendre les codes sociaux, la culture, la langue japonaise, habilement, par petites touches, le dit à travers le non-dit et inversement. J'ai bien aimé aussi la construction du livre, quatre périodes espacées chacune de six mois environ, et dans lesquelles le passé remonte peu à peu. De quoi s'agit-il ? De la guerre, destruction/reconstruction, du conflit des générations, du rôle de l'artiste dans la société, du poids du passé… Certes tous ces thèmes ont déjà été abordés, mais quel sujet ne l'a pas été ?! Tout est dans la manière, et je trouve la manière Ishiguro très intéressante, à la fois suggestive et explicative, sans jamais forcer le trait. Je le situe - par rapport aux Japonais précédemment lus - entre Kawabata (hermétique du point de vue de la compréhension du comportement des personnages) et Ogawa (sans référence japonaise). Ono le narrateur est-il un vieux con, ou un vieillard admirable ? Ni l'un, ni l'autre sans doute, mais en tout cas il accepte de se retourner sur son passé, et le nœud de l'histoire, à mon avis, n'est pas son engagement militariste à travers sa peinture, mais sa délation d'un camarade, geste dont il n'avait pas perçu alors toute la gravité et ses conséquences. Il nous manque certainement une connaissance historique de cette période de l'histoire du Japon : je n'ai pas compris l'épisode "China crisis poster". Ono communique bien avec les gens de sa génération, en revanche il a du mal avec ses filles, son gendre, mais il y a échange et complicité avec son petit-fils qui pourtant est très influencé par la culture américaine, c'est plutôt rassurant, puisqu'il est en passe de devenir trois fois grand-père.
Liliane
J'ai abordé le livre avec un a priori très favorable tant j'avais été conquise par Les Vestiges du jour. Je reste admirative du talent d'écrivain d'Ishiguro, de son écriture et de son art du récit : les infos distillées au coin d'une phrase, les digressions habiles et le suspens… Ce va-et-vient entre traditions et modernisme, avec le passage symbolique du pont de l'hésitation, m'a époustouflée, venant d'un auteur qui ne fait, ici, que preuve d'imagination. Le mariage de Noriko, la fille rebelle, sert de pivot à toute l'histoire et fournit un morceau d'anthologie quant à l'art japonais d'user abusivement des périphrases ou de "tourner autour du pot" (cf. les fiançailles de Noriko). Setsuko, soumise et modeste, se montre très habile dans l'usage de cette langue sibylline (cf. la scène avec son père où il est question de la taille des bambou, p. 116). Ça m'a beaucoup amusée. Mais cette description détaillée des traditions, des valeurs anciennes avec une condition féminine toujours très difficile, un respect inconditionnel des parents et du maître, des relations inter-classes très codées, le pouvoir des hommes, leur rôle social et familial qui les enferme bien, eux aussi, "le monde flottant" et ses artistes, tout cela m'a pesé ; je me suis parfois ennuyée. Et, même si quelques espoirs nous sont donnés sur de possibles évolutions qui feraient craquer un peu tout ce carcan (les libertés de langage du petit-fils, de son père et de Noriko, dont la belle-famille, qui n'est pas vieux jeu, n'aime pas que ses femmes se taisent ou s'effacent etc.), on n'y croit pas trop. Les culpabilités d'une époque alimentent leur désir de tourner la page, mais vers quel autre carcan ?
Manuel
Je ne saurais dire ce que j’ai le plus aimé de ce livre : son côté dépaysant, le récit éclaté avec ses nombreux flash-back, les ressouvenirs de l’artiste Masugi Ono, le contexte historique et familial, la galerie de personnages… J’avais peur que cela fasse beaucoup et en reprenant la lecture, les images me reviennent, preuve que le livre dans sa forme ambitieuse est bien construit. A chaque souvenir évoqué, nous sommes en proie aux doutes du narrateur sur le déroulement des événements, ce qui assez subtil à mon avis. Les doutes, les incertitudes de la famille quant au mariage de la fille cadette, la cérémonie miai pour la présentation des familles, la vente aux enchères symbolique : tout est magistralement dépeint. J’ai encore pensé à Ozu. Une impression qu’il ne se passe rien et que rien n’est dit alors que les silences et les non-dits sont importants. Il y a aussi ce mystère japonais : un sens de la loyauté sans faille, un personnage principal d’une droiture extrême (page 135-136). D’ailleurs, il ne m’a pas paru très sympathique…
Yvonne(du groupe breton dont les avis suivent)
Je n'ai pas apprécié ce livre à sa juste valeur ; je pense qu'il mérite plusieurs lectures ou au moins une lecture lente. Il est incontestable que les descriptions, le souci du détail, le respect des conventions sont parfaitement décrits et c'est sans doute une prouesse d'écriture de la part d'un auteur qui a quitté le Japon à l'âge de six ans et donc n'est pas imprégné, a priori, de la culture nipponne. Cependant, je me suis ennuyée à la lecture du récit de Masuji Ono. Le cheminement de ce peintre vieillissant est lent. A trois moments, qui correspondent aux préparatifs du mariage de sa fille Noriko, le narrateur fait un retour sur sa vie passée et ses erreurs par de longs, trop longs, récits ou événements vécus plus ou moins bien. Il est inquiet, agité par des remords et surtout beaucoup de nostalgie du fameux "monde flottan ", ce quartier des plaisirs de la vie nocturne. Le lien avec le peintre n'est pas évident à faire pour un néophyte lorsque le narrateur évoque ce "monde flottant qui formait tout l'arrière plan de nos tableaux" ; j'avoue ne pas très bien comprendre. Pour apprécier toutes les subtilités de l'art japonais, il m'aurait été utile d'en connaître au moins quelques rudiments. La fin du roman est toutefois rassurante, Masuji Ono semble avoir trouvé l'apaisement et je ne suis pas mécontente de l'avoir accompagné dans son cheminement.
Monique
J'ai été sensible au monde japonais, à ce va-et-vient constant entre le passé et le présent, et surtout à la psychologie très fouillée du personnage principal. Ono est un personnage complexe, vivant, très humain finalement. Il peut se montrer à la fois très attachant et vraiment insupportable. Qu'est-il exactement ? Sa discrétion et sa pudeur sont appréciables lorsqu'il évoque la mort de sa femme. Les relations entre le maître et les élèves sont parfois comiques, c'est très surprenant. J'ai trouvé l'auteur très talentueux. Ce livre est un vrai dépaysement.
Marie-Charlotte
L'univers du livre m'est totalement étranger. Le personnage principal est intéressant mais ronflant ; il se prend pour un référent d'une époque, pour un patriarche. Les confrontations avec son petit-fils, avec sa fille cadette, ébranlent justement ce rôle de patriarche, et c'est appréciable. Il y a deux lectures pour moi de ce livre : il y a le quotidien, très barbant et à côté, il y a la philosophie du récit, cette remise en question intéressante. J'ai eu beaucoup de difficultés à m'imaginer sa peinture. Les descriptions, l'urbanisme, la décoration de la maison me semblent très factuels ; il n'y a pas d'ambiance, le récit, très froid, fait penser à une thèse. Je n'ai pas eu de plaisir à retrouver mon livre le soir, et c'est bien dommage. Mais je dois reconnaître le talent de l'auteur : le récit est tellement plausible qu'on est tenté de tout croire.
Germaine
Ce livre m'a beaucoup intéressée. J'ai apprécié l'histoire de ce personnage en quête d'appréciations favorables pour faciliter le mariage de sa fille. Le constat du passé, les dégâts de la guerre etc. sont des sujets qui ont vraiment retenu mon attention. Je pense également qu'on a tendance à sous-estimer le rôle de sa fille aînée. Il est difficile pour moi de rassembler mes émotions et d'en faire un résumé ; je dirai seulement que j'ai envie tout simplement de le relire.
Michelle
Je retiens surtout de ce livre les descriptions de l'art japonais. Cette discipline, cette idolâtrie du maître me semblent vraiment curieuses. J'ai trouvé le personnage très égocentrique. Il n'y a pas d'ouverture sur le monde extérieur, Ono se positionne au centre de tout. J'ai l'impression qu'il passe à côté de beaucoup de choses, qu'il ne comprend pas le monde qui émerge. Au cours de la lecture, on cherche peut être en vain un personnage de roman alors qu'il est seulement un peintre. Le livre est très lyrique, très bien écrit ; il y a de belles descriptions.
Jean-Pierre
S'il fallait enlever les formules de politesse et autres courbettes, il ne resterait pas grand chose du livre ! Je me demande s'il s'agit là de traditions japonaises ou de traditions d'une certaine classe japonaise ? Les négociations pour le mariage de Noriko m'ont ennuyé. C'est un livre du détail, Ono dit tout ce qu'il voit, il y a trop de descriptions sans intérêt. On apprend le nom du personnage principal seulement très tard dans le livre ! A cause des multiples flash-back de flash-back, on ne sait plus où on en est et lui non plus d'ailleurs ! Qu'est-ce que çà apporte finalement ? C'est en plus un horrible fasciste. Je n'ai vraiment pas accroché avec les personnages, sauf avec le petit-fils qui met un vent de liberté sur ce livre. On a l'impression qu'Ono n'a même plus la force de s'opposer à la rébellion de sa fille cadette, qu'il est échaudé.
Nicole
Je n'ai pas particulièrement aimé ce livre et quand on pense au livre formidable qu'était Les Vestiges du jour ! J'ai haï le personnage principal, je le trouve horrible. Ono est égoïste, il a fait des choses terribles et ne les regrette même pas ! Les personnages secondaires semblent un peu plus humains. J'ai remarqué tout de même que le seul point commun entre Ono et son petit-fils est de "taper sur les femmes" ; là, au moins, ils sont sur la même longueur d'onde ! L'écriture est trop lisse, il n'y a pas de sentiments, c'est trop poli, ça manque de profondeur. Le seul intérêt du livre reste pour moi la violence sous-jacente quand il peint différemment du maître. Les scènes entre le maître et les élèves sont trop longues. J'ai remarqué des similitudes entre le tunnel du Pays de neige de Kawabata et le pont de l'hésitation. Les deux auteurs utilisent les mêmes images. J'ai été stupéfaite de voir que finalement il n'avait pour ainsi dire presque pas vécu au Japon !
Claude
J'ai trouvé le personnage d'Ono sympathique, c'est peut-être dû à son âge, à sa volonté d'aller en arrière. Je l'ai trouvé fidèle envers lui-même, fidèle vis-à-vis de son engagement d'artiste. L'artiste est reflèté dans les descriptions, dans l'art du détail. Les relations avec ses filles sont humaines, il les aime. J'ai apprécié les informations données sur le Japon.
Jessica
Mis à part le fait qu'on se perde un peu entre le présent, le passé proche et le passé lointain, j'ai apprécié le livre. J'ai accroché au suspens, à ces mystères lancés çà et là, aux réponses n'arrivant que très tard et de manière décousue ; le style est vraiment bon. J'ai aimé le fait qu'Ono se sente finalement obligé de revenir sur son passé souvent ambigu. Finalement, il est contraint de regarder ses erreurs, et de les avouer publiquement, alors que lui préfèrerait revenir sur d'autres épisodes moins compromettants et plus flatteurs, avec l'évocation par exemple du quartier des plaisirs, ou sa position sociale, épisodes toutefois pas toujours drôles non plus (les confrontations avec son propre père par exemple). Il retranscrit de manière touchante la mutation du Japon. On dirait qu'il incarne à lui seul le paradoxe japonais d'alors ; il est tiraillé entre le passé et le présent pour s'assurer, à lui et à ses filles, un avenir agréable et prometteur. Il est pris, un peu comme le Japon, entre les traditions et le modernisme et il n'avancera, comme son pays, qu'après cette analyse du passé. Mais alors, que de différences avec la culture occidentale ! J'ai été stupéfaite devant les suicides de ceux qui se sentaient responsables de la guerre (le grand patron, le musicien) et alors, toutes ces formules de politesse, toute cette comédie autour du mariage de Noriko… Sans parler du rôle pour le moins curieux de Setsuko, qui m'a un peu déroutée à la fin, lorsqu'on ne comprend plus si c'est Ono qui a mal compris ou si c'est sa fille qui lui ment en lui répétant qu'elle ne lui a jamais demandé de se confronter à son passé (p. 204). Personnellement, je pense qu'elle ment, et je ne comprends pas pourquoi.

 

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Quatrième de couverture :
Jeune homme bohème, le peintre Masugi Ono aimait à fréquenter le "monde flottant", métaphore sous laquelle les Japonais définissent les lieux de plaisir de la vie nocturne. Dans le Japon de l'après-guerre, l'artiste vieillissant se trouve confronté à un univers en dislocation, plongé dans une sombre incertitude. Il tente de donner un sens à sa vie, il dialogue avec ses contemporains et interroge son passé.