Le Livre de poche, 544 p.

Quatrième de couverture :

Lorsque, en 1846, Balzac publie La Cousine Bette, le roman doit constituer avec Le Cousin Pons le diptyque des Parents pauvres, l’un et l’autre accablés d’injures. Mais à la différence de Pons, qui sera le vieux musicien plein de cœur, dès l’origine La Cousine Bette devait voir la vieille fille disgraciée se venger de ses douleurs, ce qu’elle fera jusqu’à la ruine des siens.
Le premier projet s’est cependant élargi. Non seulement parce que les amours du baron Hulot vieillissant font de La Cousine Bette un roman érotique, et la dénonciation des affairistes dans le Paris de la monarchie de Juillet un roman de l’argent, mais parce que Balzac, renouvelant ses habitudes narratives pour mieux rivaliser avec les feuilletonistes, écrit là un livre d’action – un livre sombre, aussi, et qui n’écarte ni les ressorts ni les rebondissements du roman noir.

Honoré de Balzac
La Cousine Bette

Le nouveau groupe parisien a lu ce livre en janvier 2021.
Nous avions lu La Fille aux yeux d'or en 1996 et Le Lys dans la vallée en 2002.

Séverine (avis transmis)
J'avais souhaité mettre ce livre à notre menu car son sujet, la jalousie, m'intéresse. Et sous la plume de Balzac, encore plus. J'avoue ne pas avoir été déçue, et avoir dévoré le livre ! Que dire d'original qui n'ait été dit, et bien mieux, par tant de lecteurs ou critiques tellement plus compétents que moi... ? Car j'avoue, c'est mon premier Balzac, il était grand temps ! Je suis allée visiter sa maison-musée de Passy, lieu où il a écrit nombre de ses chefs-d'œuvres et où l'on peut admirer plusieurs de ses fameux manuscrits, montrant l'artiste au travail, et quel bourreau de travail ! Son bureau, sa chaise, et aussi nombre de sculptures représentant le colosse qu'il était. Cela m'a aidée à rentrer dans cette œuvre si intimidante car si monstrueuse, par où commencer se demande-t-on ? J'en reviens à La Cousine Bette. Son caractère retors, pervers dans la méchanceté, manipulateur et totalement insensible, tellement sa jalousie chauffe à blanc cette âme damnée, est si sombre, qu'on doute, parfois, qu'on est incrédule qu'une telle personne puisse exister. Balzac ne s'est-il pas laissé emporté en dépeignant cette ignoble personne ? Et son contraire, la belle baronne Adeline Hulot, à l'inverse, n'est-t-elle pas trop pure, trop vertueuse, et trop aimante, pour son indigne mari ? Certes. Mais la langue, les images, les personnages, les descriptions de la société, le récit et ses rebondissements sont si savoureux, que l'on pardonne aisément ces exagérations, et qu'on se laisse emporter. Les apartés de l'auteur en marge nous donnant par ailleurs tant à découvrir, on a fait un vrai voyage dans le temps, et c'est avec enthousiasme que j'ouvre ce livre en grand. Pour aller vite en lire un autre !
Christine(avis transmis)
La Cousine Bette, paru en feuilleton, a eu un très grand succès à sa parution. Je n'avais pas lu Balzac depuis mes années lycée et mes 20 ans. Je conserve un souvenir assez précis de la dizaine de romans que j'avais lus à cette époque. Je les avais appréciés. Un grand nombre d'années ont passé et je reconnais n'être pas entrée d'emblée dans le roman. Il m'a fallu quelques dizaines de pages de lecture avant que je ne m'intéresse véritablement à l'histoire, mais plus j'ai avancé dans ma lecture et plus j'ai été captivée. La structure du récit, présentation successive de chacun des personnages, jugements et commentaires de l'auteur, est datée. Elle n'accroche pas le lecteur du 21e siècle. Balzac nous décrit un monde heureusement révolu, où la femme n'existait que par les hommes et selon sa vertu, où les hommes pouvaient s'endetter sans discernement. Mais Balzac nous décrit d'une façon admirable l'emprise des sentiments sur ses personnages et l'enchaînement inexorable de leurs conséquences. J'ai été absorbée par l'histoire. La cousine Bette et sa jalousie sont le pivot de l'intrigue. Aucun membre de sa famille ne prend conscience de son rôle néfaste, elle est perçue à l'opposé de ce qu'elle est. Balzac nous dépeint un monde noir dans lequel le vice règne. Ses pages sur les faubourgs où vivent les pauvres gens m'ont évoqué Eugène Sue. Les personnages vivent leurs passions sous nos yeux. J'ai compati, j'ai été révoltée, j'ai souri aussi, selon le déroulement de l'intrigue. Je comprends le succès de La Cousine Bette à sa sortie. Je suis heureuse d'avoir lu ce livre et je vais poursuivre avec Le Cousin Pons… J'ouvre le livre en grand.
Françoise(avis transmis)
J'ai beaucoup aimé La Cousine Bette et remercie chaleureusement Séverine d'avoir proposé cette lecture. J'ai lu juste auparavant Illusions perdues et Splendeurs et misères des courtisanes avec le même bonheur. J'ai beaucoup ri (jaune chaque fois que Balzac s'exprime sur ce qu'il n'est pas : les femmes, les Polonais, les Brésiliens... ; aux éclats quand Balzac met dans la bouche des courtisanes de savoureux monologues grâce auxquels elles parviennent à retourner leur amant en leur faveur et plus intérieurement quand un adjectif suffit à Balzac pour dépeindre une situation), j'ai admiré le style de haut vol, j'ai savouré la construction du livre (le mélange des genres, les revirements des personnages...). Le livre emprunte au conte (premier chapitre où Crevel prédit à Adeline sa fin), à la chronique sociale (commentaires sur les codes respectifs de la noblesse et de la bourgeoisie), au théâtre (dîners organisées par les courtisanes) et à l'essai sur les mœurs (considérations sur les femmes ou sur le génie du peuple polonais... ou plutôt sur leur absence de génie). Le livre prend à contre-pied le lecteur : tous les personnages prennent une direction opposée à celle que Balzac leur a assignée au départ (Hortense quitte Wenceslas, Josepha vient au secours d'Adeline, Crevel lègue une partie de sa fortune à Hector Hulot, Bette est diable et ange à la fois...). C'est une tragédie qui signe le triomphe du vice sur la vertu. Certes, l'intrigue est centrée sur la déchéance d'Hector Hulot, puni par sa passion pour les femmes jeunes et le fond de cette histoire c'est l'horreur de la condition des femmes au 19e siècle (sans autre choix que d'être des ouvrières misérables, des épouses cocufiées ou des prostituées). L'essentiel de l'abomination est ailleurs : c'est le renoncement à soi-même vécu par les deux personnes qui tiennent la maison Hulot : Adeline, la sublime épouse qui en vient à se vendre à Crevel pour mettre un terme aux dettes de son mari et Victorin, l'avocat et "député puritain", contraint par la police, de faire tuer Valérie pour la mettre hors d'état de nuire.
Monique (avis transmis)
J'ai eu l'impression de lire, non pas un roman, mais un livre sur l'histoire des mœurs de la bourgeoisie parisienne sous la Monarchie de Juillet. Un grand classique, que cette Cousine Bette, au style, au vocabulaire, aux mœurs d'une autre époque, dont l'intérêt vient de l'envie de découvrir, d'en savoir plus, sur la façon dont vivait ces gens, à quoi ressemblait ce Paris de la première moitié du 19e siècle. Et je n'ai pas été déçue, car c'est un tableau coloré, vivant, précis de l'époque : vieux notables égrillards et dépravés vivant dans des maisons luxueusement meublées, entretenant à grands frais des courtisanes sans scrupules qui les ruinent ; premiers et seconds commis de boutiques à la mode ; rues de Paris où roulent des fiacres nommés Milord ; quartiers coupe-gorges autour du Palais Royal ; soirées à l'Ambigu ou l'Opéra ; spéculations financières, intrigues politiques ; on parle de dot, de religion, de misère… Bref, c'est un tableau des mœurs de l'époque, c'est le Paris d'avant Haussmann, celui de Balzac. J'ai été frappée par le machisme de l'époque et la précarité de la condition féminine : femme mariée, confinée dans son foyer, totalement dépendante d'un mari dont elle accepte toutes les infidélités, se consacrant à l'éducation de ses enfants et terriblement vulnérable ; courtisane sans scrupule qui exploite et se venge sur la bête ; femme du peuple dans la misère. La prose, le style, certainement admirable à l'époque, n'a pas la fluidité de celle des romans modernes. Les phrases sont très longues, truffées d'informations et de réflexions moralisantes sur les mœurs de l'époque. On y apprend beaucoup, mais c'est parfois long et je n'ai pas éprouvé le même plaisir de lecture. C'est une écriture d'entomologiste qui dissèque ce qu'il voit ; une étude très perspicace des personnalités, notamment celle du baron Hulot, noceur dépravé qui ruine sa famille et de la cousine Bette, personnage machiavélique, envieuse, manipulatrice et destructrice ; chacun des personnages est emprisonné dans son vice ou sa dépendance, ou les deux à la fois. Je reconnais l'habileté à décrire l'ignominie, la cupidité, la faiblesse, la lubricité, l'envie… Tous ces travers humains dont est remplie l'œuvre, mais cela sonne d'une autre époque. Tous ces personnages sont décrits à la limite de la caricature et on a du mal à croire que chacun d'eux, à l'exception de Valérie et de Bette, se laissent berner à ce point tant les ficelles sont grosses, c'est là que le roman prend le pas sur l'étude des mœurs. Mais bon, j'ai trouvé ce livre très instructif sur l'atmosphère de l'époque, période d'incertitude (on est entre deux insurrections majeures : 1830 et 1848) et on y voit se dessiner lentement le Paris d'aujourd'hui. J'ouvre aux ¾.
François (avis transmis)
Souvenir d'un jeune et sémillant professeur en Sorbonne qui répétait "Rappelez vous que comme disait Baudelaire, Balzac est avant tout un visionnaire passionné et pas seulement un observateur". On s'en aperçoit bien en lisant La Cousine Bette. Mais qu'en dire qui n'ait déjà été dit ? Sinon le plaisir que j'ai pris à relire ce roman en m'attardant (mille excuses !) à ce qui peut même sembler ennuyeux : lieux, costumes, intérieurs et tout ce qu'ils reflètent. (On connaît les théories de Balzac sur l'élégance et l'ameublement). Les descriptions abondent dans La Cousine Bette. Et elles sont le plus souvent extraordinairement révélatrices, cf. celles de "la Bette" et du baron au début du roman, le trait le plus particulier à une portée générale. Tout chez Balzac est prétexte à généralisations : "La cousine Bette, la Sauvage Lorraine appartenait à cette catégorie de caractères plus communs chez le peuple qu'on ne pense et qui peut expliquer la conduite pendant les révolutions. Il se trouve encore assez de Madame Marneffe à Paris, pour que Valérie doive figurer comme un type dans cette histoire des mœurs". (Il peut aussi lui arriver parfois, de sombrer dans des platitudes consternantes.) Mais le plus souvent, il exprime génialement la vérité des caractères et des sentiments que ses personnages incarnent jusqu'au bout des ongles. Ces vices et ces défauts sont ceux d'une société bourgeoise qu'il déteste. Marx disait en avoir plus appris sur le capitalisme avec le réactionnaire Balzac, défenseur du trône et de l'autel qu'en lisant les économistes. Paris incarne cette société corrompue par l'argent et dévorée par tous les vices. Elle devient l'égale des cité maudites de la Bible dans laquelle Balzac nous entraîne au fil des pérégrinations et de des déménagements qui marquent l'ascension ou la déchéance des personnages à laquelle presque aucun n'échappe. "Les sentiments nobles poussés à l'absolu produisent des résultats semblables à ceux des grands vices." Dans La Cousine Bette, ils s'étalent au grand jour avec une franchise et un cynisme dignes des Liaisons dangereuses. Valérie est bien une "Merteuil bourgeoise". Et Hulot un vieux libertin cynique qui ne cache jamais son jeu. Pas plus d'ailleurs que le couple Marneffe qui connaît une fin digne des pires mélodrames. La vertu même de la baronne peut tout aussi bien servir les vices du Baron.
Et il y bien sûr l'extraordinaire personnage de la Cousine Bette. Mère Courage et amoureuse quand qu'elle cajole inlassablement son beau sculpteur, furie shakespearienne dans la vengeance, victime exemplaire, prête à réclamer sa part dans un monde gouverné par l'égoïsme et l'argent. Avec Vautrin que l'on retrouve à la fin du roman, elle est un des deux grands monstres sacrés de la Comédie humaine. (Ceux de ma génération n'ont sans doute pas oublié Alice Sapritch qui joua son rôle à la télévision.) Par son caractère et son énergie , elle est un des plus beaux personnages de la Comédie Humaine. La Cousine Bette est un roman magnifique qui mériterait de biens plus amples commentaires... peut-être aurons nous un jour l'occasion d'en reparler de vive voix.

Rencontre en visio
Anne
Balzac était payé à la page et le récit nous l'indique il aimait l'argent, ceci explique pourquoi ce roman n'en finit pas, sa structure n'a pas une vraie dynamique, elle se noie dans le temps. Pourtant l'histoire est dynamique, pleine de coups de théâtre et de rebondissements affriolants, jouissifs. Toutefois, si je n'ai pas pris un plaisir profond à la façon dont les vices circulent dans la bourgeoisie du 19e siècle, c'est que je me suis en fin de compte ennuyée avec toutes ces répétitions perverses qui unissent les cercles, familiaux et collatéraux, sans jamais une once de sincérité. Pour l'écriture, remarquable, je trouve dommage que le talent de Balzac s'attarde au long d'une histoire qui traîne et qui aurait pu être achevée en 2 ou 300 pages amusantes bien ficelées avec, sinon une infinité, quelques rebondissements saisissants comme savait par exemple le faire Molière, que d'ailleurs l'auteur cite à plusieurs reprises et dont la bonne influence est notoire. C'est un livre de qualité, personne n'en doute, mais je m'en vais pourtant le critiquer.
Dans ces pages, nombreuses, Balzac nous présente sa grande érudition, tant en littérature qu'en politique, je dirais même en tout, mais comme je ne suis pas férue du 19e siècle, que je n'en aime aucune forme lorsqu'elle est prise dans une bourgeoisie classique, cette érudition ne m'a pas séduite, car Balzac cherche à séduire le lecteur au même titre que les personnages entre eux et il y a une sorte d'emprise exercée sur lui, une vampirisation. Tout est trop décrit et ne m'a pas laissé imaginer moi-même. Pour revenir de façon plus positive à la dite classe sociale je reconnais qu'elle a eu la qualité de permettre à quelques opposants de créer des œuvres magnifiques, en peinture parmi d'autres arts. Balzac en a d'ailleurs fait partie, car bien sûr ses portraits dénoncent cette société avec un humour féroce, à tel point qu'il ne reste plus aucun espoir pour aucune valeur humaine. Ce livre est désespérant de pessimisme. Il est même tragique. La pensée, les sentiments n'ont d'autre issue que l'auto-destruction. Même si ce livre parle de la liberté que l'on a à échapper au règne des systèmes religieux, il jette le bébé avec l'eau du bain, toute forme de spiritualité est exclue. J'ai envie de dire que ce roman est une farce où Balzac joue avec les sept péchés capitaux. S'ils existent depuis la nuit des temps et n'ont pas besoin de la bourgeoisie pour sortir de la boîte de Pandore, ils sont ici exacerbés et attribués à tout le peuple, petites et grandes gens, à l'état, à l'armée etc. Rien n'est épargné, en cela Balzac se montre démocrate. La haine, la jalousie, se vautrent dans d'infinies intrigues sournoises et mesquines... La paresse a le visage d'un artiste dénaturé. L'orgueil trône chez tout un chacun de façon dévastatrice. La luxure s'étale sur les sofas de chaque page, et la colère la haine la jalousie sont les ciments du récit. Tout cela est fort bien dit, fort bien dénoncé, et installé dans un convoi littéraire proche du théâtre de boulevard. Comme dans les contes de fée, tant mieux, les méchants meurent atrocement pour la plus grande jouissance du lecteur qui satisfait son sadisme inconscient, même si les gentils meurent aussi, mais après tout c'est la vie et c'est aussi ça la littérature. Balzac est donc un grand caricaturiste et il tue tout. On le sait, les caricatures existent grâce à la liberté de penser, elles diminuent tout et ne laissent au-dessus de la mêlée que ceux qui les ont faites. Balzac est un serial killer, à l'image de ses deux personnages centraux, la cousine Bette et Valérie. Il expulse toute bonté et affection, faisant faire à Adeline figure basse sous un splendide masochisme. Tous ces gens qui amassent fortune ont une forme d'avarice, ils gardent tout pour eux quand ils ne dépensent pas l'argent comme un objet magique qui malgré les faillites réapparaît sans cesse. Les dettes de l'époque ne sont sans doute pas si différentes des dettes actuelles dans lesquelles le monde s'embourbe… Le génie de Balzac était sans doute prémonitoire. Dans ce grand fleuve pas tranquille, les rebondissements vont au galop, portés par une écriture splendide, mais il y a pour moi des limites à tout et je me suis languie d'écritures plus modernes qui parlent du mal identitaire et du mal en général d'une façon plus subjective, moins pris dans les replis sociaux du vêtement bourgeois. Ce n'est là qu'une question de goût. Il m'a manqué un peu de silence, car ce roman m'est apparu trop plein de monde, trop bruyant. Pris dans un tourbillon, les personnages, ne savent pas qui ils sont. Ah, ramenez-moi un peu de solitude vraie ! Dans leur solitude abyssale et tumultueuse, personne ne pense et, comme le monde est fait en fonction de la façon dont l'homme le pense, ici il ne présente aucun devenir. Au fond, c'est ça, je n'aime pas la philosophie de Balzac, son talent n'est pas au service de l'ouverture. Sans doute, ce livre nous apprend comment est fait le monde des humains, il n'aide pas à en sortir. Il incite le lecteur amusé à rester collé aux personnages comme le papillon à la vitre lumineuse. Balzac prédit un monde décadent, et comme disait Michel Simon dans Drôle de drame de Marcel Carné : "à force de dire des choses horribles les choses horribles arrivent". Mais oui, le monde devient ce que l'homme pense, c'est donc un livre satirique fermé à la résilience. Pour ces raisons, je ne peux pas l'ouvrir en entier, ni aux trois quarts, je garde donc le livre ouvert à moitié, ce qui me permettra à l'occasion de jeter un œil ébloui sur l'écriture, sur l'humour, sur l'esprit, et sur la capacité de Balzac de comprendre avec lucidité et sagacité, les aspects si complexes de la psychologie humaine blessée. Ces qualités me feront passer outre les généralisations sur les femmes, les petites parisiennes, les Polonais et autres sujets qui m'ont pas mal agacée. Après tout, au temps de Trump et de toutes les cours d'école du monde politique, la vision de Balzac aide tout de même à voir clair sur le monde tel qu'on ne l'aime pas. Molière le faisait et je me demande ici pourquoi j'ai une tendre affection pour les personnages émouvants de ce dernier.
Olivier                   
Un Écrivain à ce point, oui, cela existe ! Et Balzac écrit, quelle chance pour nous tous, dans notre langue ! C'est le premier émerveillement, le style, la langue, les mots inventés, la précision du langage, le détail (qui parfois révèle le tout !), la fluidité ! Que vive la langue française ! Merci grand homme ! La Cousine Bette : le côté historique, social, est très intéressant, mais pas primordial à mes yeux. C'est le récit d'une famille détruite par la voracité sexuelle d'un sexagénaire et la jalousie d'une vieille fille. L'histoire est haletante, toujours surprenante, mais là encore, ça n'est pas le plus important. Et puis il y a nous, il parle de nous, de notre orgueil, de nos petitesses, de notre égoïsme, des mensonges que l'on se fait à soi, de notre capacité à nous duper nous-mêmes. Il nous parle de la jeune fille en fleurs, du libertin, de la vieille fille, de la femme vertueuse, des jeunes amoureux, de la maladie, du vieillard, de la jalousie, de la séduction, du déclin du corps, de l'érotisme, de la perversité, de la haine, de la vengeance, du chagrin, de la générosité, de la pitié... Comment sait-il tout cela ? Comment fait-il pour incarner tout cela, pour comprendre tout cela ? Ils sont si nombreux ceux dont il nous parle. Le commerçant devenu riche, l'aristocrate, le portier, le cocher, la soubrette, l'ouvrier, le banquier, le maréchal d'empire, le ministre, la courtisane, la femme vertueuse, l'avocat, le policier, l'artisan, le jeune artiste, le militaire.. Tout le monde y passe. Avec une truculence, un humour, une ironie parfois féroce, une clairvoyance ! Hector Hulot est le symbole de notre avidité. Le plaisir, la chair, encore et encore ! A 60 ans, à 70 ans, à 80 ans ! Revenez donc Hector Hulot, car nous sommes vos dignes successeurs, nous avons maintenant le Viagra ! Revenez donc Valérie Marneffe ! Vous pourrez chantez à tue-tête, "Je, Je, suis libertine, je suis une catin" ! Vous pourrez aussi écrire vos conseils sexuels dans les revues féminines, puis les exécuter dans des films licencieux pour ensuite animer une émission à la TSF. Revenez donc encore père Hulot ! Nos banquiers vous montreront les plus belles combines, les subprimes, les madofs, le surendettement proposé même aux plus pauvres ! Venez voir notre société à nous ! Car assurément, vous êtes des enfants de cœur ! Venez voir comment nous envions Johnny qui affiche 30 ans de plus que Laeticia ! Venez voir nos armoires qui débordent, venez voir ce que l'on jette tous les soirs dans nos poubelles, comment nous vivons maintenant à crédit sur... la planète. Balzac nous montre la comédie humaine, notre comédie. Nous voilà décrits tels que nous sommes, dans cette lutte permanente pour exister, avoir un bon toit, être en sécurité, protéger notre corps, mais sans cesse vouloir plus, plus de plaisir, toujours plus, le plus longtemps possible. Dans ce livre, tous ces électrons que nous sommes s'agitent avec frénésie, courent dans tous les sens, du haut en bas de l'échelle sociale, avec toutes les passions humaines, tous les vices et les vertus, pour un résultat dérisoire pour les uns comme pour les autres. Mais en définitive, cette comédie est tragique et il n'y a pas trace de rédemption. C'est ma seule réserve pour ce livre en particulier. Dans ce livre, Balzac ne croit plus en rien, il n'y a pas l'espoir, pas l'amour qui triomphe et éclaire notre existence. Il ne nous parle pas de l'Homme, lequel malgré toutes ses turpitudes, possède la sublime faculté de se penser dans le monde, de réfléchir à son existence, de trouver l'amour et la paix. Malgré cela, en graaaannnnd !
Katherine  
J'ai débuté avec entrain la lecture de ce roman, et j'ai lu assez rapidement les 300 premières pages. J'ai ensuite fait une pause dans ma lecture pour lire un autre livre, puis je n'ai bizarrement pas eu la motivation d'y revenir. Pourtant, tout me plaisait dans ce roman. J'avais l'impression de lire du théâtre ; chaque chapitre était une scène différente, avec son décor et ses personnages, l'action était soutenue, les intrigues étaient multiples, bref il n'y avait aucune longueur. Par contre, l'ensemble a fini par m'apparaître trop exagéré et caricatural (la déscription grotesque des vices des uns et des autres, le déballage de clichés incluant le vieil homme aimant les jeunes femmes, l'épouse fidèle et malheureuse, la pauvre femme jalouse de la beauté et du succès d'une autre, l'artiste rêveur et paresseux, etc.). Bien que ça m'ait fait sourire (et parfois rouler les yeux), j'ai fini par me lasser ; je n'étais pas tenue en haleine, je n'avais pas hâte de connaître le dénouement. J'ai simplement profité de ma lecture chapitre par chapitre, mais mon intérêt n'était pas assez vif pour finir les 600 pages de l'œuvre. J'y retournerai peut-être éventuellement, pour sa facilité de lecture et sa légèreté. J'ouvre à moitié.
Nathalie         
Cela faisait longtemps que je n'avais pas lu un roman de Balzac. C'est un auteur dont plus je lis de romans, plus j'aime l'écriture. Après tous ces auteurs contemporains, retrouver une écriture traditionnelle, linéaire, ordonnée, m'a fait réfléchir sur ce qu'entraînaient sur le lecteur la pensée bien organisée, le sens donné à cette écriture correspondant à l'idée même du sens de la vie. Ce qui selon moi la différencie profondément de l'écriture contemporaine de l'après Seconde Guerre mondiale qui, au contraire, est désordonnée et ne s'autorise plus l'expression d'un monde sensé (chaque roman étant une représentation d'un monde). Cela n'est pas contradictoire avec le côté feuilletonesque du récit. J'ai pour ma part bien accroché malgré des personnages typés, presque caricaturaux. Ils nous restent en mémoire tels les caractères de La Bruyère. La langue précise de Balzac donne corps aux personnages, aux scènes. Je suis d'accord : il y a un aspect théâtral dans nombre d'épisodes de ce roman. J'ai bien aimé aussi les passages sur l'art, sur l'inspiration qui n'est rien sans travail acharné. J'ai été subjuguée par les sculptures de Wenceslas Steinbock ; par leur seule description, Balzac leur donne incroyablement vie. Je crois d'ailleurs que ce sont mes passages préférés. J'ouvre aux ¾.
David...

 

Nos cotes d'amour, de l'enthousiasme au rejet :
                                        
à la folie
grand ouvert
beaucoup
¾ ouvert
moyennement
à moitié
un peu
ouvert ¼
pas du tout
fermé !

 

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