Jean-Bernard Pontalis
Le Songe de Monomotapa

Nous avons lu ce livre en septembre 2009.

Christine
J'ai beaucoup aimé le début, la citation et le projet : c'est un beau programme que je trouvais superbe. Mais j'ai été déçue. C'est très superficiel et anecdotique, comme par exemple le passage sur Jean-Pierre Vernant. On se dit qu'il a eu une vraie amitié mais on n'est jamais impliqué. Il y a de l'auto-complaisance et de l'auto-satisfaction. J'ai détesté le passage sur New York avec la journaliste dont il se souvient à peine mais en revanche il se souvient de Jacob. Moi, ça me déplaît. A chaque fois qu'il parle des femmes, c'est déplaisant. J'ai beaucoup aimé la citation de la correspondance entre Albert Camus et René Char.

Claire
Il parle mieux de l'amitié des autres...

Christine
Je ne vois pas ce qu'est l'amitié pour lui. Il ne s'en approche pas et nous nous non plus. On apprend à se connaître dans l'échange. Je suis sûre qu'il est capable de nous dire des choses qu'il ne nous dit pas. J'ai aimé le passage du transfert avec le psy qui est comme un ami unique lors de l'adolescence. Mais tout ça n'est qu'effleuré et c'est ce qui m'a déçue. Ce beau programme qu'il s'était fixé n'est pas du tout atteint. Je l'ouvre à moitié parce que je sens que c'est quelqu'un de bien.
Françoise O
Je n'avais jamais lu Pontalis, c'est une sommité. J'ai trouvé que c'était un projet extraordinaire. Le départ est très intéressant (citations p.14 et p.16). On va avoir une étude mais on ne comprend pas où est l'obstacle. La p.18 est très forte. Son propos sur les collègues, ça n'a pas d'intérêt. À chaque chapitre, c'est à nous de faire l'analyse. L'idée m'a intéressée, l'idée qu'on écrit. Le lecteur devient un ami. Il est en contradiction avec moi : l'amitié est une relation qui est égalitaire. Il manque de cohérence. L'idée du compagnon imaginaire m'a plu. Il nous présente une histoire et c'est à nous de nous poser les questions. Il nous dit de chercher au fond...

Christine
... il cherche à nous faire réfléchir.

Françoise O
"Avec l'humour ne deviendrait-on pas son propre ami "... des platitudes. J'ai été très touchée par l'amitié avec les lieux, les plages, les mers... Je vais l'accuser d'erreur de lecture... Je deviens odieuse. J'ouvre à moitié parce que le sujet dont il parle est extraordinaire et parce qu'il pose de bonnes questions.
Françoise G
En écoutant l'avis de Françoise O, le livre n'est peut-être pas si mal. C'est le livre d'un psy et il pose des questions sans y répondre. Il me reste une image abimée de Pontalis dont j'avais lu Le Frère du précédent. J'ai trouvé que c'est un livre de commande. Tous ses amis qui lui suggèrent d'écrire un livre sur l'amitié, ça fait très manuel scolaire. Je trouve que la forme et ce qu'il y met est laborieux. La table des matières est une sorte de repérage. La plus belle chose, c'est sur les gens qu'on ne connaît pas : ce sont des esquisses. J'en attendais plus mais ce n'est pas arrivé. On sent Pontalis vieux. On sent sa sagesse, on le sent timide. Il ne décrit pas la nuit à New York avec la journalise qui vient en contre point de l'amitié. Pontalis, c'est l'anti Philip Roth : il n'assume pas. Quelques passages m'ont beaucoup touchée par exemple p. 37. J'ai trouvé ça bouleversant. Il a des qualités qui sont aussi ses défauts. Le passage de l'Algérien est très touchant.
Manuel
C'est drôle, je ne me souviens plus de toute les anecdotes que vous venez de raconter. Je me souviens de ce qu'il dit des livres qu'il a lus... Il aurait pu en faire une liste. Je le trouve prétentieux et pas très sympathique. Je n'aime pas le côté happy few : il a connu du beau monde, c'est complaisant. On ne fait que piocher et ce n'est pas très intéressant. Il donne des ouvertures. Le passage de New York m'a fait penser à VGE et Lady Diana.
Claire
Je n'ai pas boudé mon plaisir mais avec toutes les réserves que vous avez dites. Il y a des hors sujet (p. 137). C'est agréable car il n'y a pas de narration... et j'ai parfois des problèmes de mémoire. C'est un livre léger. Pontalis m'a paru sympathique. Le côté people : ça le déprécie, ça ajoute à la superficialité comme si le fait de parler de gens remarquables devait rendre le livre remarquable. Il effleure, il passe en revue : on a du plaisir à le voir évoquer tous ces éléments.
Annick
Pontalis a été une révélation pour moi. Je suis désolée mais ce livre va vous dégoûter de Pontalis. Dans ses premiers livres, il n'y a pas tout ça et il écrit très bien. Le tissage entre tous les personnages est nourri de d'expériences humaines. Il porte un regard qui est nourri de choses observées. J'ai relu d'autres livres de lui et celui-ci est affreusement décevant. Ses autres livres m'éclairent mais celui-ci n'est que fragmentaire, c'est juste un tissage. Il met des mots justes sur des choses. Il tisse de l'humain avec son expérience personnelle de psychanalyste. Il a une façon de dire les choses qui est simple. Il suggère. Ce livre n'est pas abouti, pas intéressant. Il a une façon de se poser dans le monde qui correspond à quelque chose de chez moi. Il est dedans et à côté. Ce sont des choses qui me concernent. Ça m'éclaire sur des choses essentielles. Il parle dans ses autres livres de l'humanité. C'est une amie qui m'avait offert un livre il y a longtemps et depuis j'adore Pontalis.
Jacqueline
J'ai été séduite par le côté facile à lire mais j'ai beaucoup de mal à porter un jugement là-dessus. Je suis déçu que ça ne vous ait pas plu. Cette espèce de distance, ce n'est pas du tout son style. Son style est fait d'associations d'idées. Mais j'en ai beaucoup oublié car je l'ai peut-être lu trop vite. L'amitié d'Artaud avec son éditeur : là j'ai trouvé ça merveilleux. La sincérité d'Artaud et de Pontalis, l'errance dans le cimetière : ça me touche beaucoup.

Françoise D
Vous avez déjà tout dit. Je n'ai pas aimé ce livre. La dédicace à Daniel Pennac m'a surprise. Pourquoi Daniel Pennac ? Ça m'intrigue.

Claire
C'est lui qui lui a suggéré d'écrire le livre sans doute...

Françoise D
Il enfonce les portes ouvertes. Je n'ai pas besoin de lui pour me dire ainsi ce qu'est l'amitié. Ce qui m'a intéressée, c'est l'amitié entre Freud et Fliess ; la façon dont il en parle, on sent que c'est son élément. Il a les qualités de ses défauts : il laisse beaucoup de place au lecteur. Est-ce parce qu'il est psychanalyste ? J'ai l'impression de perdre mon temps. Je n'avais rien lu d'autre de lui que le dictionnaire de la psychanalyse. On s'attend à mieux même si c'est bien écrit.

Annick A
Je m'apprêtais à venir ce soir mais de retour de Bali je ne suis pas encore remise du décalage horaire et je tombe de sommeil. Donc je renonce.
Lors du choix du Songe de Monomotapa j'avais déjà donné mon avis en n'optant pas pour ce choix. Je le renouvelle. J'ai lu ce livre il y a quelques mois et il ne m'en reste pas grand chose. Je le trouve très léger et en surface. Quelques touches impressionnistes n'offrent pas un éclairage bien nouveau sur la notion d'amitié qu'il a bien du mal à définir. On se balade agréablement sans plus.

Monique
Ce livre m'a été conseillé par une amie qui m'en a parlé de façon si enthousiaste que je l'ai proposé au groupe. Je suis peut-être moins emballée qu'elle... Ce livre ne m'a pas rassasiée ; mais il m'a donné faim.
J'attendais quelque chose comme Apprendre à vivre de Sénèque, que j'avais lu au soleil de la côte amalfitaine à Taormine, avec l'impression qu'un homme très sage, grand connaisseur de la nature humaine me tenait par la main pour m'expliquer la vie...
Là, avec Pontalis, rien de tel. Je suis restée étrangère à cet homme, à sa vie, à ses connaissances mondaines, à "ses chances" un peu gênantes pour moi, simple et banal fétu de paille dans la multitude.
Mais, ce livre que je n'ai pas tellement aimé en fait, m'a beaucoup interrogée. C'est vrai que l'amitié : qui la définit, où commence-t-elle ? Où finit-elle ? Se nomme-t-elle ? C'est une notion volatile, qui va, qui vient, qui butine, ou qui enthousiaste. L'amitié n'est pas réservée à un seul, au contraire, elle grossit en puissance comme une boule de neige puisque les amis de nos amis sont souvent nos amis... Elle n'est pas chronophage, puisqu'on peut considérer comme très grand ami quelqu'un qu'on voit très peu, à cause de quelques moments ou émotions, ou idées chaleureusement partagés... Il y a forcément des déclarations d'amour mais pas de déclarations d'amitié. Ceux que l'on considère comme amis le savent-ils toujours ? Est-ce réciproque ? Ce livre, sa préface en particulier, m'a permis de verbaliser toutes ces qualités et je suis plus consciente de la merveille qu'est l'amitié. Elle garde " le quelque chose très précieux " des terrains vagues. Certains chapitres m'ont fait réfléchir à comment sommes-nous présent pour nos amis, comment nous accompagnent-ils vivants, ou morts ? Françoise O m'a souligné le passage sur l'amitié des lieux. J'ai été particulièrement sensible dans " Intérieur, extérieur " à la capacité de chacun à être un ami pour soi-même. Je suis de plus en plus persuadée qu'un nœud névralgique de la vie, du bonheur est là.
Je répète donc : ce livre ne m'a pas repue, mais mise en route...
Lil (de Bretagne)
C'est vrai : un livre est pour moi un ami, un ami qui accompagne au quotidien en informant, en suscitant des interrogations, des remarques, en infirmant ou confirmant mes propres expériences, mon propre ressenti, en enrichissant ma réflexion, en ouvrant des portes sur des possibles. C'est la possibilité d'échanger avec quelqu'un d'intelligent que je ne rencontrerai jamais, de côtoyer un milieu qui n'est pas le mien, d'entrer dans l'intimité de personnes différentes de moi et qui, pour la plupart, me sont bien souvent étrangères.
Ce fut donc une rencontre très heureuse avec le livre de Pontalis : son cheminement au travers de ses diverses expériences de l'amitié (de toute une vie !) m'ont fait revisiter les miennes. Nous avons eu un véritable dialogue riche de sa pensée de psychanalyste et de son expression brillante et subtile.
J'ai adoré l'hommage à Vernant, la rencontre improbable entre Jacques Rivière et Antonin Artaud et la déclaration d'amitié à Michel Cournot.
Je me promets de lire En lieu sûr de Wallace Stegner et de revisiter les écrits de Montaigne.
Des portes s'ouvrent !
D'autres se ferment : pauvre Freud !

Marie-Thé (de Bretagne)
J'ai beaucoup aimé Le Songe de Monomotapa de J.B. Pontalis (même si je ne l'ouvre pas en entier), même chose pour Frère du précédent et Elles, où je me suis replongée. Ce sont des livres qui me parlent, me font du bien, tout simplement ; et que je retrouverai de temps en temps. J'en retiens de merveilleux passages sur l'amitié, la fraternité, les femmes... Jean-Bertrand Pontalis est un intellectuel, et ici tellement humain... J'ai juste envie de conclure par ces quelques lignes (c'est l'auteur qui nous parle de l'amitié qui "s'était tissée" entre lui et J. P. Vernant) : "Peut-être m'a-t-il trouvé assez différent de lui pour pouvoir me reconnaître comme un autre proche avec qui on prend plaisir - tel est le paradoxe de l'amitié - à partager ce qui vous sépare." A méditer.



 


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L'amitié : comment elle naît, puis se tisse, se renforce et parfois se dissout d'elle-même ou s'achève par une rupture ? Les amitiés : il en est qui traversent le temps, d'autres qui sont éphémères et pourtant intenses.