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      Raphaël Confiant 
        Ravines du devant-jour
      folio
       
      Annick   
        Cela va aller assez vite. Cest le genre de livre que je déguste 
        avec un bonheur total ; le dépaysement, les rites, lécole, 
        les paysages, les amours... On voyage et puis il y a la langue qui me 
        fait voyager. Pour certains mots, je marrête pour écouter, 
        ça met en images. Pas par goût du pittoresque. Il y a un 
        art de raconter porté par une langue savoureuse. Jai aimé 
        ce tutoiement qui installe un rapport avec le lecteur. Je trouve ça 
        magnifique. Cela nous met dans une situation particulière. Cest 
        beau, très abouti, exceptionnel. Jen ai lu dautres, 
        plus littéraires au sens de lélaboration. Celui-ci 
        est plus simple, au contraire de livres précieux faisant preuve 
        dune recherche peut-être trop intello. On se représente 
        bien les personnages. Cest une réussite totale. On na 
        pas envie de lire dune traite, jai regretté de le lire 
        vite pour ce soir. Il y a des scènes formidables (la séance 
        du « catéchisse ») : la vie déborde, 
        on est embarqué, cest le triomphe de la vie. Il y a un amour 
        pour son pays. Jai adoré, le plaisir lemporte, je ne 
        vois pas quelle limite poser. Je suis allée en Martinique deux 
        ou trois fois. Ces écrivains ont su inventer une langue portant 
        le métissage. Il ne cherche pas à faire des effets. Ça 
        prend comme une crème. Cest un livre intéressant sur 
        ce quest être nègre. Il y a une foi dans la puissance 
        des mots. 
        
      Françoise D.  
        Difficile de passer derrière Annick. Soit on est touché 
        par la langue soit pas. Au début je me suis demandé si je 
        nallais pas me lasser. Eh bien non, au contraire, jai été 
        de plus en plus emportée, intéressée. Ces mot me 
        ravissent, ils me rappellent pour certains le patois de mon enfance en 
        Bretagne. On retrouve du vieux français, des expressions tombées 
        dans loubli ; cest savoureux et pas artificiel, donc 
        on marche. Il y a des scènes tordantes, comme le vol du jambon 
        des sapeurs-pompiers, la façon dont papa Loulou marie ses filles 
        et ce nest pas anecdotique- ; on voit comment fonctionne 
        cette société, ses codes, ses strates, cest plein 
        denseignement. Je navais rien lu de Confiant, javais 
        lu le Texaco de Chamoiseau, très différent. 
        
      Annick - Cest un chef duvre, Texaco !  
        
      Françoise D. 
        Le parcours de « Chabin » de Confiant est très 
        intéressant : ses parents (enseignants), ses tantes lui lisent 
        des livres et lui racontent les contes de fées des « blancs ». 
        Le métissage est total, il a aussi une grand-mère dorigine 
        chinoise. Le tutoiement marque la distance entre cet enfant quil 
        était et lhomme (lécrivain ?) quil 
        est devenu. Je nai aucune réserve, il ne faut pas bouder 
        son plaisir, je recommanderai ce livre. 
        
      Jacqueline  
        Je nai plus grand chose à dire. La manière dont lauteur 
        peint le monde, la société, ma embarquée. Je 
        nétais pas dans la curiosité de découvrir cette 
        société. Je nai pas compris pourquoi le titre. 
        
      Claire - Il y a deux couplets sur la ravine : p.250 « Tu 
        te réfugies déjà dans la ravine du devant-jour, insensible 
        à ses appels » (de son père) et surtout p.243 : 
        « Finie la diaphanéité de la ravine. O Ravine, 
        ô émerveillable dentre tous les lieux »... 
        
      Jacqueline - Il y a des moments où la traduction du 
        créole est loin de loriginal... Il a publié une méthode 
        Assimil du créole. Je regrette le côté morcelé 
        en chapitres ; jaurais préféré quil 
        y ait une seule grande histoire, pour cela je louvre   
        
        
        Françoise G 
        Entre   et 
           
        Cest le cadeau du groupe-lecture car sinon je ne laurais pas 
        lu. Après la soirée sur La question humaine, jai 
        apprécié cette fraîcheur exquise qui ma reposée. 
        Je lai lu avec beaucoup de plaisir tout du long. Après la 
        vraie surprise  jai tendance à aller vers des 
        choses sérieuses - jai trouvé le plaisir plus 
        dans la force des mots car ce qui est raconté est banal. Les expressions 
        désuètes emportent dans le temps, comme de lancien 
        français. Je me suis demandé sil ny avait pas 
        des néologismes. Ce tutoiement, je lai abordé dabord 
        en me demandant si cétait lauteur. Ce tutoiement représente 
        le fossé entre Confiant et Confiant, les deux langues, le narrateur 
        et lauteur, moi et toi. Je lai vu plus comme une fêlure, 
        plus quune intimité. La construction en chapitres donne une 
        facilité de lecture, en évitant une construction plus importante. 
        Chaque chapitre forme comme une nouvelle, est autonome. Jai trouvé 
        que le dernier chapitre tranche ; comme sil disait tout ce 
        quil navait pas pu dire avant : pourquoi il est devenu 
        écrivain, pourquoi cette sexualité. Cest explicatif, 
        comme un règlement de compte. Il demande des explications à 
        ses parents. Ce chapitre ma détachée du livre. La 
        partie la plus délicieuse est le lexique, encore mieux que les 
        histoires. Cest comme si je revenais des îles. On peut inviter 
        à le lire. 
        Chamoiseau et Confiant diffèrent politiquement. Confiant a défendu 
        Dieudonné. 
        
      Claire  
        La langue est sans conteste une surprise et un plaisir. Comme pour Françoise, 
        la découverte goûteuse des néologismes saccompagne 
        dune question : est-ce une authentique parlure ou est-ce une 
        création littéraire ? Jémets cependant 
        des réserves sur cette langue en raison de tournures clichées : 
        « une collection de Zola annotée par une main fiévreuse », 
        « les glissérias feuillissent le sol de la tendresse 
        violette de leurs fleurs », « la fulguration indomptée 
        de son dire ». 
        Lutilisation systématique de mitan pour milieu ma agacée. 
        Laffectation nest jamais loin : « limminence 
        est leur âge », « cest elle, Philomène, 
        parée daura livresque, que tu recherches désormais 
        en toute femme. Tumultueusement. Désespérément. » 
        Les propos solennels sur lenfance tombent un peu à plat : 
        « ton enfance sest achevée avec la conscience 
        du Temps (et de sa fuite de fol coursier) », de même 
        que le projet littéraire : « lécriture 
        comblera cette inconsolation » 
        La narration est réduite et le livre constitue plutôt pour 
        moi un documentaire sur la Martinique de 1959, un guide du Routard bien 
        informé de lintérieur, même si un « tu » 
        gênant nous fait croire aux découvertes dun négrillon 
        de 6 à 9 ans. Le narrateur-auteur nest pas extrêmement 
        sympathique : il nest pas exempt de vantardise : « Les 
        maîtres nont pas assez de louanges sur ton imagination » ; 
        la façon dévoquer les séances de torture danimaux 
        donne limpression quil pourrait remettre ça ; 
        le regard sur les relations hommes-femmes correspond aux stéréotypes 
        (de la part dun noir, ça nétonne pas !) 
        Vis-à-vis des noirs, on naccepterait pas dun blanc 
        des propos concernant le racisme entre ethnies, le langage de certains, 
        leur savoir (ceux des sorbonicoles), les vêtements (Lhomme 
        cravaté-laineté par exemple), et la susceptibilité 
        du nègre, aussi susceptible quun pet chaud. Cela rappelle 
        Mabanckou, et cest positif sur ce point. 
        Quant au contexte historique, le point de vue de lenfant est intéressant. 
         pour la 
        découverte 
       
        Marie Thé  
        Cest un livre qui fait du bien, un livre savoureux et plein de fraîcheur. 
        Je connais bien cette Martinique dont parle Raphaël Confiant, mon 
        mari y a grandi à la même époque que lui ; et 
        ce qui est ici raconté, je lai souvent entendu... Et jaime 
        toujours aujourdhui cette petite région du nord-est de lîle. 
        Cependant, je peux comprendre que cette « douce enfance créole » 
        en ait découragé plus dun(e)... 
        
      Sylviane 
        C'est le premier roman créole que je lis. J'ai essayé un 
        texte de Patrick Chamoiseau, mais me suis arrêtée rapidement : 
        - une lecture difficile  
        - un style parfois lourd, avec le vocabulaire créole (difficulté 
        compréhension)  
        - un narrateur ("tu"), personnage principal qui se parle, 
        comme s'il se regardait, se jugeait 
        - de nombreux personnages, dont on raconte la vie -> difficulté 
        parfois à ne pas les confondre. 
        Tout cela casse le rythme de la lecture, la rend plus longue. 
        Mais on entre finalement dans l'histoire, tardivement, peut-être 
        parce que l'on s'habitue à la langue. Langue colorée, gaie, 
        imagée. Sujet du roman : l'enfance et son monde (insouciance 
        (bêtises), curiosité, découverte (de l'autre sexe...). 
        C'est ce qui m'a finalement plu dans ce texte, mais je n'en conseillerais 
        pas forcément la lecture... sauf pour ceux qui se sentent "disponibles" 
        pour ce genre de littérature : des personnes ayant longtemps 
        séjourné ou vécu dans les Antilles par exemple, qui 
        pourront se référer à ce qu'ils connaissent de cette 
        culture et des particularités linguistiques. Voilà, j'espère 
        être plus enthousiasmée par le programme de cet hiver ! 
      Lil  
        Avant la lecture de ce livre, je ne connaissais les Antilles qu'au travers 
        de souvenances brocantées par les amis au retour des îles, 
        souvenances accompagnées par etcetera de photos et de cartes postales... 
        Grâce à R. Confiant, j'ai nettement-et-proprement pris pied 
        en terre martiniquaise, coquillant mes yeux, veillative, la caquetoire 
        bouclée et écarquillant les trous de mes oreilles de dix-sept 
        largeurs pour écouter les broderies langagières savoureuses, 
        si-tellement imagées, de ses habitants. Du bonheur ! 
        J'ai adoré les portraits : Man Yise et ses filles, Papa Loulou, 
        Léonise et son « massibole » Hermann, Hermancia, 
        la quimboiseuse, ensouchée dans sa solitude, les pitoyables grands-blancs : 
        de Valminier, le débanqué, Paul-Marie de Cassagnac, le chien-fer, 
        et toute la foultitude des autres : du né-couillon à 
        la grande-grecque, du coursailleur de filles aux coq-calabrailles, et 
        les djobeurs, accoreurs, conteurs, etc. 
        Atmosphère très joyeuse, malgré le dénuement 
        matériel et un quotidien difficile : une autre attitude face 
        à la vie (les doucineurs de l'existence !), face à 
        la mort aussi (très intéressante, cette façon d'appréhender 
        et d'apprivoiser la mort). 
        Ce regard d'enfant, frais et innocent, posé sur son île, 
        ne dissimule pas : 
        - les terribles cicatrices laissées par l'esclavage dans l'inconscient 
        collectif  le sentiment d'infériorité intégré 
         (cf. l'attitude envers les « grands-blancs ») 
        - le racisme très présent, des habitants entre eux : 
        l'échelle de valeur associée à la couleur (du plus 
        noir au plus pâle, sans oublier les cheveux et les yeux) - et 
        envers ceux qui sont venus remplacer les esclaves affranchis : les 
        coulis ; avoir vécu l'esclavage ne dissuade pas de reproduire 
        mépris et humiliation 
        - l'éradication musclée et humiliante du créole 
        dans les écoles qui n'est pas sans rappeler l'éradication 
        du breton 
        - le sort des femmes (mariages imposés  infidélités 
        récurrentes des époux) 
        - l'éternel masculin (se passe de commentaires !) 
        - le recours au rhum pour béquiller la vie (le décollage 
        au rhum à 50° !) 
        J'ai vraiment aimé ce voyage en Martinique, même si nombre 
        de mots et d'expressions m'ont été incompréhensibles : 
        ils n'ont pas gêné ma progression de mornes en ravines... 
      Nicole  
        J'ai lu ce livre comme un documentaire à la fois linguistique et 
        social. J'ai un peu peiné au début, du fait du créole, 
        puis je me suis habituée et ai été emportée 
        par l'histoire et les personnages.  
        J'ai été frappée par l'abondance de vocabulaire lié 
        aux couleurs de peau et à la place de chacune dans l'échelle 
        sociale. 
        Quant à la place des femmes ! Je n'aurais jamais osé 
        imaginer les procédures de mariage ! 
        C'est un livre que je n'aurais sans doute jamais lu sans cette proposition 
        du groupe. Sur les conseils de Marie-Thé, je vais également 
        lire Chamoiseau et Glissant. 
       
      
       
       
      
       
       
      
      
        
       
 
     
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