Quatrième de couverture : "Un matin de bonne heure, tard dans le siècle, à Cricklewood Broadway. À six heures et vingt-sept minutes, en ce 1er janvier 1975, Alfred Archibald Jones, tout de velours côtelé vêtu, était assis dans un break Cavalier Musketeer rempli de vapeurs d'essence, le visage sur le volant, à espérer que la sentence divine ne serait pas trop sévère. Prostré, les mâchoires relâchées, les bras en croix comme quelque ange déchu, le poing refermé d'un côté (gauche) sur ses médailles militaires, de l'autre (droit) sur son certificat de mariage, pour la bonne raison qu'il avait décidé d'emporter ses erreurs avec lui. [...] Il avait joué à pile ou face et s'était tenu sans défaillir au verdict du hasard. Il s'agissait là d'un suicide mûrement réfléchi. Mieux, d'une résolution de nouvel an."

Maniant le loufoque, la satire et l'humour avec un art consommé, Zadie Smith produit ici un premier roman détonant, qui frappe par son ambition et son extraordinaire énergie. Ajoutons l'actualité des sujets abordés et la vitalité d'une prose qui se colore de tous les accents de la terre.

Zadie Smith
Sourires de loup

Nous avons lu ce livre en mars 2004.

Katell
Je suis très embêtée pour ce livre. C'est le genre que j'aurais aimé aimer. Je l'avais pris à la bibliothèque au moment de sa sortie (il y a deux ans ?) et j'avais abandonné. Quand je l'ai repris, je ne me souvenais que du suicide manqué. Pourtant, je me suis rendu compte que j'avais été jusqu'à la page 350. Et je ne me souvenais de rien ! C'est tout le problème. L'écriture est sympa, la narration agréable, les histoires s'enchaînent. Mais pourquoi cette impression d'inconsistance ? Les personnages ne sont pas bien campés, ils manquent de profondeur. Zadie Smith en prend un, il lui arrive des choses, mais tout reste en surface. Par exemple, l'histoire de Samad et Poppy Burn-Jones. Aussi vite racontée, aussi vite oubliée. La jolie rousse est un personnage qui traverse quelques chapitres. Pourquoi ? Qu'apporte cette relation ? Je n'ai pas saisi. Idem pour Clara et son arrivée spectaculaire, son enfance. Ensuite, aux oubliettes au fond de sa cuisine. Tous ces rebondissements ne font pas un bon livre. On peut penser qu'il y a la problématique de la croyance (les Témoins de Jéhovah, le fondamentalisme musulman, le scientisme), mais hélas, je la trouve abordée sous forme d'anecdotes sans grand intérêt. Bien sûr, il y a quelques scènes hilarantes, dans la tradition du roman anglais (David Lodge) : chez les Chalfen, le dîner avec la nièce de la honte et la question de la mère Chalfen sur les seins. Un roman d'une très jeune femme, qui aurait gagné à être plus ramassé, le propos plus délimité. A vouloir brosser une fresque, on s'y perd et on s'y ennuie.
Qui a compris le titre ?????
Claire
Je partage entièrement ce point de vue qui explicite mes impressions. J'ai lu une bonne centaine de pages dans de très bonnes conditions pourtant (vacances) et tout à coup je me suis dit, mais tu vas perdre ton temps avec ce pavé. Plus tard, par mauvaise conscience, j'ai repris ce pensum avec la séquence censément désopilante sur les parents d'élèves. Le café-théâtre, ça me barbe. Ca m'est tombé des mains. Je ressens une certaine colère vis-à-vis du succès que rencontre ce livre. Je trouve que la réponse de l'auteur dans une interview à la question suivante est bien à l'image du livre : "Les trois mots qui évoquent le bonheur ? Fromage, assiette, plat principal, cela en fait quatre !"… Totalement spirituel !
Françoise
C'est la première fois je crois que j'exprime un avis après "maturation", car en effet, j'ai lu ce livre depuis plusieurs mois, et je ne l'ai pas relu pour notre réunion (trop gros). Et je dois dire qu'avec le temps mon plaisir de lecture ne s'est pas démenti, au contraire. J'en ai un excellent souvenir.
Lorsque je l'ai commencé, j'ai trouvé le début très enlevé, très réussi (le suicide d'Archie), et je me suis dit que Zadie n'arriverait pas à soutenir le rythme. C'est à la fois vrai et faux. Pour un livre aussi épais, il est évident, normal, qu'il y ait des longueurs, encore que ce ne soit pas les mêmes pour tout le monde, mais finalement, il est très bien construit, et avec l'apothéose de la fin, à la hauteur du début dans la conduite du récit. Une fois le livre refermé, je peux dire que j'ai tout aimé, et le temps passant, je pense que c'est un livre important, que l'auteur y montre une grande maîtrise et une maturité peu communes pour son âge ; et pour ne rien gâcher, c'est drôle.
De plus, c'est un témoignage rare. Le sujet des immigrés en Grande Bretagne a été plus traité au cinéma qu'en littérature, me semble-t-il. Ici, sont abordés le racisme, l'immigration, le déracinement, l'assimilation, mais toujours de façon "anecdotique", ce n'est jamais pesant ou sentencieux. Même si bien sûr il y a des exagérations, si certains personnages sont caricaturaux (les Chalfen), l'auteur y prouve un grand sens de l'observation et a bien évidemment puisé dans son vécu : elle est probablement - en partie - Irie. Il y a des trouvailles romanesques qui prouvent une riche imagination : la souris, le groupe KEVIN, l'improbable amitié entre Archie, le passif et looser ultime et Samad, le musulman agressé par l'immoralité de la société britannique (jusqu'à ce qu'on apprenne leur secret). Samad est le plus antipathique (à part les Chalfen) et peut-être le moins convaincant en ce qu'il se montre dominateur, intelligent, mais néanmoins reste un larbin, un résigné (une vengeance de l'auteur ?). Bref, une lecture jubilatoire.
Christine
Je n'ai pas été enthousiasmée par le livre. Après un début de lecture très agréable, je me suis lassée. Si les deux personnages masculins principaux, Samad et Archibald, sont largement décrits, il n'en est pas de même de leurs épouses. Tant qu'à lire 735 pages, j'aurais bien aimé en savoir plus sur les pensées de Clara et d'Alsana. L'introduction de la famille Chalfen surcharge inutilement le récit, je n'ai jamais réussi à m'intéresser aux tribulations chalfaniennes. La fin, avec l'histoire de la souris mutante, est à mon avis complètement ratée. Ces réserves mises à part, "j'ouvre le livre à moitié" pour la fraîcheur et la spontanéité du style, pour la façon dont sont traités le multiculturalisme, les questions d'identité que se posent les immigrés de première ou deuxième génération (j'ai pensé au personnage de Grein dans Ombres sur l'Hudson d'Isaac B. Singer), l'amitié d'Archibald et de Samad, deux laissés-pour-compte de la société... et pour l'humour.
Geneviève
J'aurais aussi aimé aimer ce livre… Je ne l'ai pas lu tout à fait jusqu'à la fin, mais je trouve que "la mayonnaise ne prend pas" ; je le finirai cependant. J'ai l'impression qu'à partir de ce kaléidoscope de personnages, ces sketches successifs à la Woody Allen, l'éditeur n'a pas fait son boulot : trop d'idées intéressantes, mais qui n'aboutissent pas, trop de personnages : ce trop ne fait pas un tout. Un livre qui ne va pas assez loin dans l'approfondissement ou, à l'inverse, dans le loufoque.
Liliane
J'ai lu 10 pages… mais je n'ai pas envie de continuer : j'oublie au fur et à mesure que je lis. Je suis perturbée comme dans une conversation avec quelqu'un de trop bavard, je pense à autre chose… ; je ne peux pas saisir de filon. Le livre me paraît bavard, facile et avec des effets de ronds de jambe. L'imitation du langage oral est fatigante et me rappelle le style de certains magazines féminins…

Geneviève et Françoise (qui l'ont lu en anglais)
Ce n'est pas fatigant en anglais

Claire
C'est la journée internationale des femmes cette semaine…
Nicolas
L'objet livre est nul : le titre, la photo…
Par contre, le livre véhicule des valeurs positives, telle que l'acceptation des autres ; il y a " quand même " un style et je trouve la manière de parler rigolote. Mais je ne garde aucun souvenir. Ah si, la fin est décevante. Au début, il y a une surcharge, un effet recherché par le suicide. La descente d'escalier de Clara est magnifique. Archi est un gros naze. La scène du tank est forte, mais celle avec la prof rousse n'est d'aucun intérêt. La scène de la masturbation est loupée. Quant à la fin, elle est affligeante...
Jacqueline
Je l'avais lu quand il est sorti et aucun souvenir ne me restait, sauf la Jamaïque et les témoins de Jéhovah. Je l'ai relu, mais je préfère les livres où on peut vibrer, s'identifier aux personnages. Il y a de bons sentiments sur le melting pot. En relisant, malgré le sentiment de pensum, j'ai trouvé des scènes intéressantes. Samad est sympathique. L'auteur a du talent, mais je n'aime pas le ton ironique permanent. Comme dans les romans populaires du XXe siècle, il y a des personnages à foison. Si je ressens de l'admiration pour l'auteur, ce genre de grand roman, de saga populaire ne m'emballe pas. Pour ma part, j'ai eu l'impression que les personnages avaient un parler authentique.
Loana
J'ai lu une partie du roman aux urgences à Bichat, mais ce n'est pas le contexte hospitalier qui influence mon opinion… Ce livre est un scandale ! Il faudrait le démonter et le remonter. J'ai eu de temps en temps du plaisir, mais j'ai l'impression d'être flouée. L'auteur a l'élan, des choses à dire, mais le livre n'est ni fait ni à faire. Je lirai quand même son prochain…
Brigitte
J'ai lu ce livre à Londres et quand je levais les yeux dans le métro, je voyais les personnages… Samad est le centre des problèmes évoqués. L'auteur aborde un sujet intéressant, soulève des questions importantes (cela m'a rappelé aussi ce que j'ai vu au Pakistan), mais sans savoir le mener à bien. Elle ouvre un chantier, c'est valable de l'avoir fait.
Manu
J'étais surpris par le début livre qui possède une atmosphère sympa, "jeune", et en plus qui cite une chanson sublime "Waterloo station" des Kinks. La tentative de suicide annonce quelque chose qui aurait pu s'ouvrir sur un récit épique, mais à la longue je m'ennuie ferme ! J'ai pensé aux romans de John Irving, ces sagas sur plusieurs années... mais où il ne se passe pas grand-chose. Le roman est très délié, ça va dans toutes les directions, les personnage apparaissent, disparaissent sans savoir pourquoi : je ne comprends pas le projet. Si le but est de divertir, je n'ai ressenti que de l'ennui. La parenthèse sur la deuxième guerre mondiale n'apporte rien, de même que les détails botanniques de la mère Chalfens... On se lasse, c'est répétitif, on oublie, il n'y pas de cohésion... Pourquoi avoir tout mis du manuscrit de Zadie Smith !!
Et ce titre français complètement nul... Mais qu'a fait l'éditeur ??
Tenir sur 735 pages est une gageure qui ici devient un véritable labeur !

Monique
Je n'ai pas lu ce gros livre. La tête ailleurs...
Mais je voulais vous transmettre ce petit passage d'un livre Jacques Poulin Les Yeux bleus de Mistassini :
"- Une dernière question, juste entre nous : un bon livre, ce serait quoi?
- Un bon livre, c'est quand on a envie de tourner les pages pour connaître la fin de l'histoire et qu'on se retient de le faire par crainte de rater les qualités d'écriture..."


 

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