Jacob et Wilhem Grimm
Contes

Nous avons lu ces Contes pour Noël 2003.

Renée
J’en ai relu un ou deux.

Annabelle
J’en ai eu marre. J’ai trouvé cela ennuyeux comme la pluie. Dans mes souvenirs d’enfance, c’était joli, poétique. Tout se ressemble. Au bout de cinq contes, j’ai arrêté, à la Peau de 1000 bêtes. Je me suis profondément ennuyée. La préface est intéressante. Je suis venue ce soir pour fêter Noël, pas pour parler du livre.

Claire
J’avais proposé Le Vaillant Petit Tailleur de Chevillard, sans succès. J’étais très contente de voir accepter Grimm. Je suis assez d’accord, c’est tout le temps pareil. A la fin, j’ai le même malaise. J’en ai lu une grande partie. (Claire lit le préambule du Vaillant Petit Tailleur). J’ai lu les deux livres en même temps. Chevillard raconte l’histoire du Vaillant Petit Tailleur avec des digressions permanentes. Par exemple, avec les deux géants : "Quand on se réveillera, on lira la psychanalyse des contes de fée." Mais j’ai sauté des passages du Chevillard. Je trouve que la lecture psy des contes est caricaturale. Andersen, j’en garde un souvenir magique, Alice au Pays des Merveilles, c’est éblouissant.
Katell
Comme cela fait 15 jours que j’ai une voiture, je lis moins. Je l’ai lu avec mes filles. Trois contes par soir. J’ai demandé l’avis de ma fille Ada qui a 9 ans. Elle l’ouvre en entier. On a choisi chacune un conte. J’ai choisi La fille sans main. C’est trash. Le côté catho et pieux m’a aussi étonnée. Quand on lit à voix haute, c’est moins ennuyeux. C’est un peu chiant mais bien pour les enfants.
Jacqueline
Je ne l’ai pas franchement relu. Je croyais que j’aimais énormément Grimm. Mais ce qui m’a frappée, c’est cette espèce de cruauté. Les oiseaux sur chaque épaule à la fin de Cendrillon, qui crèvent un œil de chaque belle-sœur, c’est horrible. J’ai été un peu déçue en relisant la préface de Marthe Robert : c’est très dithyrambique. Je trouve remarquable ce travail de collecte. Mais les frères Grimm ne sont pas des auteurs. Ils retranscrivent. Perrault aussi collectait, mais il retranscrivait. Là, il y a une collecte très riche des différents dialectes d’Allemagne, qui n’apparaissent pas à la traduction. C’est dommage. La préface rend hommage à la première parution, qui est fidèle, fruit de cette collecte. La deuxième parution a été édulcorée : Doucette, la fille donnée à une sorcière car elle est enceinte. La fille aux grands cheveux, qui fait monter son galant dans sa chambre le long de sa natte. La princesse Raiponce qui est enceinte. La troisième parution a arrangé la langue, avec une tournure plus parlée. J’ai été un peu déçue. Je n’ai pas trouvé le conte de Dame Trude, qui a cette tonalité de cruauté que j’aime chez Grimm, avec un langage direct, ramassé.
Geneviève
Je n’ai pas tout relu. J’ai relu la préface. Cela m’a rappelé des souvenirs, de ma formation de bibliothécaire pour enfants. J’ai été complètement passionnée, ce n’est pas du tout édulcoré. J’ai été fascinée par la cruauté. J’ai trouvé la préface de Marthe Robert moins bien. Les récits sont extraordinairement brefs et créent des univers. Cette cruauté me frappe moins aujourd’hui. A l’époque, on sortait des années 60, de leur côté sirupeux. J’ai entendu des conteuses extraordinaires qui mettaient en valeur cette cruauté, ces chutes brutales. Je garde un souvenir ému.
Loanna
J’en garde une impression de profond malaise. Se couper un orteil pour mettre une chaussure ! Je veux bien que cela ait une vraie utilité mais je préfère la version édulcorée. Malaise quand il y a de la vengeance. Les yeux crevés dans Cendrillon, c’est juste un seul œil. Donc les filles deviennent borgnes, c’est encore plus méchant ! Peut-être aussi que ce n’est pas une bonne traduction. J’ai été très déçue, je suis même en colère, ça m’agace. Je pensais avoir du plaisir.
Manuel
Je suis très content de l’avoir lu. J’ai été étonné par la cruauté. C’est très cruel, alors que c’est pour les enfants. J’ai trouvé la préface très intéressante. J’ai préféré piocher. C’est très répétitif et à la longue, ça doit gonfler ! Du coup, j’ai lu également Perrault. C’est un univers complètement différent, c’est génial, truculent. Dans Cendrillon, il y a même de l’ironie. Grimm, c’est très court, très condensé. Il se passe pleins de choses sur quelques pages. Perrault, il y a beaucoup plus d'humour. La Belle au Bois Dormant ne s’arrête pas au mariage, il se passe plein de choses après. Dans Perrault, j’ai trouvé la langue vraiment intéressante. Il est antérieur. On ne sait pas d’où viennent ces contes : c'est fascinant ! D’Inde ? Origine aryenne ? Entre Grimm et Perrault, il y a un traitement différent, bien que ce soit les mêmes thèmes, les mêmes histoires.

Jacqueline
c’est cela qui a donné l’idée d’arianisme. Mais tu retrouves en Chine une histoire semblable au Petit Chaperon rouge.

Manuel
c’est une découverte. Cela change des versions pour les gamins, revues par Walt Disney.
Brigitte
J’ai beaucoup aimé Andersen. Grimm, c’est une découverte, cela m’a beaucoup intéressée. J’ai retrouvé les mêmes histoires, même dans le second livre, on retrouve l’histoire de Boucle d’Or. Ce sont des thèmes qui reviennent. J’ai été frappée par le genre littéraire dans la répétition et les poncifs. Dans la Fille aux cheveux d’or, il faut répéter la même phrase 10 fois de suite. Ce sont des effets très peu appréciés dans le reste de la littérature et qui sont la base du genre. Je les ai lus à la file. Ce sont des contes courts. Même si c’est cruel, les petites filles adorent avoir peur. Une chose m’a frappée, page 280-281, " Je vais demander à ma servante qui garde mes pensées. "

Françoise
J’ai un très bon souvenir des contes d’Andersen et de Perrault. J'hésite entre fermé complètement ou entr'ouvert. J'ai dû perdre mon âme d'enfant car j'en ai eu vite assez. Alors pour me distraire, j'ai lu en alternance la Psychanalyse des contes de fées de Bruno Bettelheim. Mais après avoir appris que :
- "les héros mythiques offrent d'excellentes images favorables au développement du surmoi"
- la maison de pain d'épice (Jeannot & Margot) "est le symbole de la mère"
- "dès que les jeunes héros cèdent aux pressions du ça indompté, ils risquent d'être détruits"
- "le loup ne se contente pas d'être le séducteur mâle, il représente aussi les tendances asociales, animales qui agissent en nous" (le petit chaperon rouge), "ici l'histoire témoigne de certaines difficultés oedipiennes…"
- "la belle au bois dormant dit qu'une longue période de repos, de contemplation, de concentration sur soi peut conduire et conduit souvent à de grandes réalisations"
- "Cendrillon guide l'enfant depuis ses plus grandes déceptions - les désillusions œdipiennes, l'angoisse de castration, la mauvaise opinion qu'il a de lui-même... - jusqu'au moment où il développe son autonomie, où il devient sérieux dans son travail et où il atteint son identité positive"....
Je me suis arrêtée là !
Liliane
Je ne sais si les frères Grimm étaient des adorateurs des nains de jardin (divinités de l'antiquité nationale germanique), mais je comprends maintenant où Walt Disney a puisé son inspiration : fausse naïveté, poésie fleurie, simplicité maniérée : "Et les animaux vinrent aussi pleurer Blanche neige, d'abord une chouette, puis un corbeau, enfin une petite colombe". Pourtant je le jure sur la tête des sept "bons" nains, j'y ai mis de la "bonne" volonté ; j'ai même, pour mes élèves, le projet d'une comparaison de conte entre Grimm et Perrault. Malgré l'introduction laudative de Marthe Robert que j'ai lue attentivement, ainsi que la notice à la fin du livre, je n'ai pu parvenir qu'à la moitié du recueil. Certes le contenu de ces contes est intéressant à découvrir (les sages femmes, les rituels initiatiques sanglants... déjà partiellement analysés dans La Psychanalyse des contes de fées) mais l'expression me lasse. Il n'y a pas de "poésie naturelle de la spontanéité" en écriture comme l'affirme Jacob Grimm ; si elle peut exister à l'oral, elle ne peut être retranscrite telle quelle, et d'ailleurs il ne s'est pas gêné pour remanier l'oral afin de le rendre soit disant plus spontané encore. Je préfère l'écriture de Perrault, et ce n'est pas une préférence culturelle... J'avais beaucoup aimé les contes d'Andersen ; j'ai toutefois été intéressée de connaître une autre version de quelques-uns de ces contes populaires.
Monique
J’ai été un petit peu déçue. Il manque le côté merveilleux, qui fait rêver. Cela vient peut-être de l’époque, des forêts sombres, il n’y a pas beaucoup de choses gaies. Les frères Grimm ont voulu stocker des trames, avec des conteurs qui ont chacun leur façon de raconter. Mais la base est la même. Ce qui me fascine, c’est le côté universel qui existe dans tous les contes. Les histoires varient en fonction de la géographie mais il y a des universaux. Je n’ai pas trouvé ces contes aussi cruels que ça. Je me souviens de la Fille aux mains coupées. Ma fille avait pris le livre à la bibliothèque et en couverture, une fille avec ses bras coupés nets. Ce qui m’a manqué, ce sont les illustrations. J’ai énormément besoin des illustrations. Cela pourrait être sublime si c’était illustré. C’est un sujet qui m’intéresse beaucoup car j’en fais l’étude avec mes élèves de 6ème. Toute la variété, ce travail de collecte. La préface de Marthe Robert ne m’a pas impressionnée. J’ai un ami conteur. C’est pour lui une base de travail sur laquelle il peut rallonger, raccourcir : ce sont vraiment des trames, qui ne sont pas plaisantes, cela manque de fioritures.
Christine
J’aime cette tradition des contes. Je n’aime pas les lire, j’aime les entendre. J’ai été très intéressée au début, cela me rappelait qu’on m’en avait lu étant enfant et dit d’une façon différente. On ne coupait pas les mains et les pieds. C’était raconté par ma mère d’une façon différente. Les images m’ont également beaucoup manquée. J’ai été surprise par la brièveté, comme dans Blanche-Neige car les images tenaient beaucoup de place, c’était très riche. Je me suis posée beaucoup de questions sur le côté fondateur des contes car les enfants ont besoin des contes pour se construire. J’ai commencé Les Mémoires d’un Paysan Bas-breton, la misère noire, la veillée où l’on dit des contes. Ces gens illettrés, quand ils sont en groupe n’ont pas de conversation, alors ils se racontent des contes. Quand une mère passait du temps avec son enfant, elle avait besoin d’échanger des paroles. Elle disait des contes, c’est le premier genre d’histoires qu’on échange. Ça m’a beaucoup intriguée, intéressée, mais aussi un peu lassée. J’en ai lu pas mal dans le RER. On ne retient pas les contes qu’on ne connaissait pas à part le Diable aux trois cheveux d’or qui a une fin humoristique.

Renée
J’ai le sentiment que c’est un document, un recueil dans le but de fixer une histoire, pas un livre dans un souci de raconter de belles histoires poétiques.

Annabelle L
Je crois que les lecteurs font une confusion des genres. Je comprends qu'ils soient parfois troublés par la cruauté des contes de Grimm, mais il faut savoir que ce sont des contes traditionnels initiatiques. Laissez donc de côté la lecture psychanalytique et laissez dormir en paix ce bon brave Bettelheim. Les contes initiatiques sont des formules qui sont propres à aider chacun dans son épanouissement personnel. Les personnages des contes représentent les différentes facettes d'une seule et même personnalité. De plus, les contes possèdent des clefs de lecture. Le héros (ou l'héroïne) est toujours parti pour un voyage au cours duquel il sera soumis à de multiples épreuves jusqu'à la mort symbolique par laquelle il renait et se transfigure. C'est pourquoi le Chaperon rouge de Perrault sort de la tradition tandis que celui des frères Grimm s'y inscrit totalement. Il ne faut pas être effrayé à la place de nos enfants. Ils savent faire la part des choses et les contes leur parlent bien plus qu'on ne le pense. Il ne faut pas oublier enfin, que les contes peuvent être lus de mille manières (sociologique, psychologique, esthétique, métaphysique...) mais qu'ils ont été écrits par un seul auteur : L'inconscient collectif. Et cet auteur là possède et maîtrise l'art du symbolisme à un degré qui échappe aux consciences individuelles. Soyons donc humbles et ne changeons rien aux contes.

 

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Des Contes de Grimm, on ne connait guère en France que les plus célèbres, encore est-ce à la faveur d'une confusion, puisque, pour le grand public, ils appartiennent bien plus au monde du dessin animé qu'aux deux savants allemands qui les ont relevés pour les sauver de l'oubli.