Quatrième de couverture : Le hussard sur le toit : avec son allure de comptine, ce titre intrigue. Pourquoi sur le toit ? Qu’a-t-il fallu pour l’amener là ? Rien moins qu’une épidémie de choléra, qui ravage la Provence vers 1830, et les menées révolutionnaires des carbonari piémontais.
Le Hussard est d’abord un roman d’aventures : Angelo Pardi, jeu
ne colonel de hussards exilé en France, est chargé d’une mission mystérieuse. Il veut retrouver Giuseppe, carbonaro comme lui, qui vit à Manosque. Mais le choléra sévit : les routes sont barrées, les villes barricadées, on met les voyageurs en quarantaine, on soupçonne Angelo d’avoir empoisonné les fontaines ! Seul refuge découvert par hasard, les toits de Manosque ! Entre ciel et terre, il observe les agitations funèbres des humains, contemple la splendeur des paysages et devient ami avec un chat. Une nuit, au cours d’une expédition, il rencontre une étonnante et merveilleuse jeune femme. Tous deux feront route ensemble, connaîtront l’amour et le renoncement.

Giono
Le hussard sur le toit

Nous avions lu Un roi sans divertissement en 1989.
Nous avons lu ce livre en décembre 1994.

Et le groupe de Tenerife en septembre 2023, ce qui a été l'occasion de saisir les avis à l'emporte-pièce pris en note à Paris dans un cahier trentenaire... (à cette époque le site n'existait pas).


Voici les réactions de Brigitte, Claire, Dominique, Elisabeth, Fernando, Henri-Jean, José Luis, Liliane, Monique S, Nieves, Rozenn, Sabine


Fernando
Je suis venu vous voir, mais je n'ai pas lu le livre, ni rien de Giono !

Dominique
Je suis allée jusqu'à la page 124. J'en ai eu vite ras-le-bol du choléra et des cadavres.
Il y a certes de belles descriptions, mais il répète les mêmes expressions.
Je ne sais pas si j'irai jusqu'au bout si ça parle tout le temps du choléra.
Et que c'est barbant cette nature ! Ce pittoresque me lasse.

Elisabeth
Je suis allée jusqu'à la page 140 ; ça m'ennuie, ça ne m'intéresse pas ! Si vous me motivez, je continuerai.

Rozenn
J'adore tout ! Je suis amoureuse d'Angelo. Ce livre-là, ma maman lisait quand j'étais petite. Je lui ai demandé de me le lire, elle m'a dit non, je ne te lirai pas de telles horreurs. Mais j'en parlais avec ta grand-mère....
J'aime Angelo, je veux rencontrer un homme comme ça, il dorlote tout le monde. Il s'efforce tout le temps d'être quelqu'un de bien, alors que sa lettre lui dit d'être fou. C'est l'apparence de la grandeur : je marche !
Je n'ai pas pu aller jusqu'au bout, je me suis arrêtée à la page 148. Ce type qui lave les cadavres et qui échappe à tout, c'est un héros !

Brigitte
J'ai bien aimé. J'aime moins la fin. Angelo est un adolescent qui agit avec panache. Il y a une distance avec Pauline de Théus, dénommée "la jeune femme".
Angelo fait référence à un autre roman (Angelo).
Les descriptions sont abondantes. En dépit des des longueurs, et à cause d'elles, Giono décrit une épidémie ; on voit passer les mois de l'été et la chaleur accablante.
Le livre évoque de la réalité de la maladie. Le lecteur devient un spécialiste du choléra...

Henri-Jean
Je suis allé jusqu'à la page 142. J'ai été déçu. Je n'aime pas Giono. J'ai lu les livres de Giono dont Pagnol s'est inspiré : mais Le hussard sur le toit, quel ennui ! Dès le début, c'est long.
Giono veut reprendre un équivalent de la Chartreuse de Parme et Fabrice del Dongo. Il y a peu de pensée élaborée chez Angelo. Je n'aime pas.
"Il n'est pas donné à tout le monde de commander" : tout ce passage, je ne comprends pas.

Liliane
Je l'ai lu il y a 3,4 ans : je me souviens de quelques moments forts, en particulier le passage sur les toits.
Angelo est fantasque, il a des valeurs, il n'a pas de mobile, il cherche ce qui donnera un sens à sa vie à travers des situations fortes. J'ai lu le livre Angelo qui est très à part, on ne peut pas s'y projeter. Angelo est un pur morceau de littérature, d'une langue très légère.

Monique
J'avais lu Giono dans mon adolescence. J'ai lu l'an dernier Un roi sans divertissement, livre très complexe qui m'a fascinée.
Je me suis ennuyé en lisant Le hussard. J'ai lu ensuite Angelo qui veut faire une révolution par le bonheur du peuple.
La suite qu'il donne, c'est Pauline et l'amour n'est jamais nommé. Il y a un moment sublime de rapprochement quand il soigne Pauline. Quand il va à Aix, Angelo reste fasciné par l'odeur du mouchoir, fascination qui ne se concrétise jamais.
J'aime beaucoup mieux les récits courts comme Angelo. Souvent, Giono Jojo se laisse aller à la fascination de l'écriture. Les romans de Giono après la guerre sont une quête de sens à donner à la vie. Le meilleur Giono à mon avis c'est Un roi sans divertissement où le sublime est toujours dans le suicide ou le crime.

Claire, qui propose de la Clairette de Die
500 pages, c'est trop long, je n'aime pas les gros livres, mais c'était une découverte.
J'ai des réserves sur les moments philosophiques, ce qui me plaît, c'est l'action. La description du choléra, c'est extraordinaire, e ne m'en suis pas lassée. Les descriptions de nature me plaisent également, ce sont des morceaux de bravoure.
J'ai beaucoup apprécié les ruptures de style avec savoir-faire quand un personnage entre en scène.
Pour moi la clé du roman c'est une émission sur Giono où l'un de ses voisins raconte que Giono aime beaucoup les westerns et j'ai pensé alors qu'Angelo, c'est Lucky Luke (j'aime beaucoup Lucky Luke).
Angelo et Pauline, j'ai du mal à y voir plus que de la camaraderie...
Angelo est un soldat pour qui la guerre est un jeu ; le choléra c'est un combat.

Sabine
J'avais acheté Angelo et je n'en ai lu que la moitié. Le hussard je n'en ai lu qu'un passage. Angelo c'est léger, avec beaucoup de vivacité. Et je n'ai pas trouvé l'enthousiasme que j'attendais.


Le groupe de Tenerife
s'est retrouvé le 26 septembre 2023
en petit comité (5 sur 8) avec un avis sur Whatsapp.

Nieves précise l'ambiance générale que nuanceront deux avis détaillés ci-dessous : ce que je peux dire, c'est qu'on a pas du tout aimé Le hussard sur le toit. On l'a tous trouvé imbuvable, malgré l'opinion très répandue qui le considère comme un des meilleurs romans du XXe siècle...

Nieves
J'avoue que j'ai eu du mal à arriver au bout de cette lecture. C'était comme un même tableau "noir" qui se répétait et se répétait : des paysages dévastés, des villages désertés où les gens s'étaient enfuis ou étaient morts, des cadavres et des mourants devenant bleus par la cyanose qui provoquait le choléra… Au milieu de tout ça, un héros, Angelo, un Italien fuyant sa patrie pour cause d'assassinat, qui cherche à trouver son frère de lait à Manosque. Pourtant, le parcours sera long et chemin faisant il trouvera des gens très particuliers, sans doute, comme le petit garçon voulant aider ceux qui sont malades, la nonne qui lave et transporte les morts, les médecins qui donnent leur avis sur la maladie, surtout le dernier qui leur indique le chemin à suivre pour arriver à Gap, et Pauline qui deviendra sa compagne de voyage jusqu'à la fin…
Un roman d'aventures ? Peut-être, mais très peu crédible. Qu'est-ce que Giono voulait transmettre avec ce texte, considéré par certains un des grands romans du XXe siècle ?
On pourrait dire, d'une part qu'il souhaite montrer les mystères et l'héroïcité du genre humain. Les premières plus abondantes que la deuxième, bien entendu : tous ces gens qui partent en courant laissant leurs morts derrière, en voulant seulement sauver leur peau et devenant agressifs vis-à-vis de ceux qui arrivent, en les enfermant dans des quarantaines mortelles, ne me semblent pas très représentatifs de la compassion ou de la pitié humaines… C'est vrai que l'écrivain a vécu la guerre et l'accusation injuste de collaborer avec les nazis, deux expériences qui l'ont beaucoup marqué, l'amenant à se replier sur lui-même et à avoir un goût très amer sur la condition humaine.
Puis, il y a aussi le paysage, une nature détériorée par l'épidémie et l'abandon mais où on peut trouver par contre quelques belles images :

"Le petit village sous lequel ils passaient était… agrémenté… par des balustrades,… des tuyautages de tuiles roses, des treilles… des escaliers d'un blanc d'albâtre… la très belle cage en fer forgé du clocher montait jusque devant les fenêtres à meneaux d'un château campagnard qui coiffait le sommet du tertre avec ses créneaux naïfs et les minces cyprès de ses terrasses".

"À mesure que les châteaux de nuages s'éloignaient l'un de l'autre découvrant de plus en plus du ciel, l'azur vira au bleu de gentiane et tout un ostensoir de rayons de soleil se mit à rouer à la pointe extrême des nuées".

D'autre part, on trouve aussi des réflexions curieuses :

"Cette lutte est juste et c'est pour sa justice que je l'ai entreprise… il est incontestable qu'une cause juste, si je m'y dévoue, sert mon orgueil… La lutte. C'est-à-dire une épreuve de force, dans laquelle j'espère être le plus fort. Au fond, tout revient à : 'Vive moi'…
Laver les morts c'est un acte inutile à tout le monde, mais très utile à notre orgueil (la nonne et lui)… Je sais que je vaux plus que tous ces gens qui avaient des positions sociales, à qui on donnait du "Monsieur" et qui vont jeter leurs êtres chers au fumier…
Giuseppe : Les paysans n'ont des visages intelligents que dans notre pays. Ici, ils ont la figure plate des écus…
Faire confiance au vague à l'âme ? Dans lequel tout est paisible ; surtout l'impossible puisque, dans les moments vraiment critiques c'est précisément de l'impossible qu'on a besoin."

Probablement, en revenant en arrière, j'aurais pu trouver des passages auxquels il valait la peine de m'y attendre, cependant, je me réaffirme dans les mauvaises sensations que j'ai ressenti tout au long de ce récit jusqu'à la dernière page.

José Luis
Livre étonnant que celui-ci. D'abord par le thème - une épidémie de choléra - choisi par l'auteur, après par le type de récit qui rappelle les romans d'aventures du XVIIIe siècle plutôt que ceux du XIXe ou du XXe siècles, enfin par le manque de mouvement dans l'action, puisque, sauf dans la partie finale sur laquelle je reviendrai, on dirait que - quoique le narrateur dise au sujet de déplacements répétés du héros - le lecteur, moi, en tout cas, a l'impression d'être toujours à la même place, c'est à dire à la place de la mort qui occupe tout et égale par là villages, villes, paysages… Cette omniprésence de la mort, la répétition constante des descriptions des terribles et irréversibles effets de la peste, font que la lecture du livre est difficile, fatigante, très souvent ennuyeuse, et même écœurante. Il est vrai que, par moments, malgré tout, le texte se met à respirer, notamment quand la nature fait place aux hommes et aux femmes, morts, mourants ou vivants. D'ailleurs le livre débute sur une très belle description du commencement d'une journée :

"L'aube surprit Angelo béat et muet mais réveillé. La hauteur de la colline l'avait préservé du peu de rosée qui tombe dans ces pays en été. Il bouchonna son cheval avec une poignée de bruyère et roula son portemanteau.
Les oiseaux s'éveillaient dans la vallon où il descendit. Il ne faisait pas frais même dans les profondeurs encore couvertes des ténèbres de la nuit- Le ciel était entièrement éclairé d'élancements de lumière grise. En fin, le soleil rouge, tout écrasé dans des longues herbes de nuages sombres, émergea des forêts
".

Un peu plus loin, la description d'un ensemble d'arbres nous surprend aussi par sa beauté (en même temps que, je ne peux pas le taire, par sa maladresse, car en cinq lignes, le mot "or" revient innécessairement quatre fois, et c'est loin d'être la seule fois où l'auteur commet ce type de, disons, manque d'attention, qui, pour moi, est une grave faute littéraire) :

"Puis la route tournait vers l'ouest et, soudain rétrécie à la dimension du chemin muletier qu'elle était devenue, elle était pressée d'arbres violents et vifs aux troncs soutenus de piliers d'or, aux branches tordues par les tiges d'or crépitantes, aux feuilles immobiles toutes dorées comme des petits miroirs sertis de minces fils d'or qui en épousaient tous les contours."

Mais ces morceaux, assez fréquents, restent noyés par la ritournelle des descriptions des effets de la peste et des pestiférés.
Il n'y a que vers la fin que le roman change de tonalité : pendant tout le voyage où le héros, Angelo, accompagne - vers un lointain patelin où elle espère rencontrer son mari - une jeune, belle et courageuse femme, nommée Pauline, dont il avait fait la connaissance à l'époque où il se promenait sur les toits de la ville et entrait dans les maisons à la recherche de quoi se nourrir. Le long de tout ce périple, vécu dans une intimité pleine de respect et de pudeur, ils s'éloignent du choléra, la vie reprend ses droits et le lecteur attend que l'amour fasse son apparition, à tel point les deux héros lui - me - semblent faits l'un pour l'autre. Seraient-ce seulement des âmes frères ? Ou cacheraient-ils leurs sentiments amoureux par respect à des valeurs d'un ordre supérieure ? Je n'en sais rien. Mais pendant la lecture de cette dernière partie du roman - qui est un roman en elle-même - je n'ai cessé de penser que ce qui explique le respect mutuel dont les deux compagnons de voyage font montre l'un vers l'autre, c'est qu'il partagent, sans avoir besoin de se l'avouer, les codes propres de l'"amour courtois" du Moyen Âge, dans sa version d'amour platonique, évidemment.
Pour terminer, un dernière question resterait à élucider : pourquoi ces deux-là, qui ne fuient pas, au contraire, le contact avec les malades de choléra deviennent des rescapés ? Je ne vois d'autres réponse que celle-ci : Giono avait besoin de les maintenir en vie pour que son roman puisse avancer.

 


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