Repères biographiques

1896-1913 : enfance et formation
1914-1918 : les rencontres littéraires pendant la période de la guerre
1919-1939 : entre les deux guerres
1941-1946 : cinq années en Amérique
1946-1966 : activités artistiques et politiques

• 1896-1913 : enfance et formation

- 1895 : naissance de Paul Éluard - 1897 : naissance de Philippe Soupault et de Louis Aragon
- 1896 : naissance d'André Breton à Tinchebray dans l'Orne en Normandie. Son père est gendarme. Il est élevé d'abord à Saint-Brieuc par son grand-père maternel.
- 1900 : il a q
uatre ans quand sa famille s'installe à Pantin. "Mes premières aubes, je les ai rêvées sur le canal de l'Ourcq, à Pantin et route d'Aubervilliers, à Pantin Quatre-Chemins". Son père est comptable dans une cristallerie.
- 1906 : il entre au collège Chaptal.

- 1912-1913 : en année de philosophie, il commence à s'intéresser aux arts plastiques, visite musées, galeries, expositions, notamment la galerie Bernheim. Attiré par Gustave Moreau, Bonnard, Vuillard, Roussel, Signac, et par les arts primitifs (avec la somme d'argent reçue à l'occasion de son succès au baccalauréat, il s'achète son tout premier fétiche, un objet de l'Île de Pâques). Il lit Baudelaire, Valéry, Mallarmé, Huysmans.
- 1913 : à 17 ans, il suit les cours du PCN, porte d'entrée des études médicales.

• 1914-1918 : les rencontres littéraires pendant la période de la guerre

- 1914 : Breton rencontre Paul Valéry ; s'engagent visites et correspondance régulière jusqu'en 1922.
Francis Picabia, qui échappe à la mobilisation précède Duchamp, réformé, à New York : tous deux bénéficient de l'accueil chaleureux du milieu de l'avant-garde. Des œuvres majeures de Marcel Duchamp ont été présentées aux USA dès 1913.
- 1915 : mobilisé dans l'artillerie comme infirmier militaire, il fait ses classes à Pontivy (où se réunit souvent le groupe Voix au chapitre-Morbihan…), puis est versé dans le service de santé à Nantes.
Il a fait à Lorient la découverte exaltante de Rimbaud dont il parle dans Nadja p. 54 du pouvoir d'incantation : "Rien de moins, le mot incantation doit être pris au pied de la lettre. Pour moi le monde extérieur composait à tout instant avec son monde qui, mieux même, sur lui faisait grille : sur mon parcours quotidien à la lisière d'une ville qui était Nantes, s'instauraient avec le sien, ailleurs, de fulgurantes correspondances". Début des relations épistolaires avec Apollinaire.
- 1916 : rencontre déterminante de Jacques Vaché en convalescence à l'hôpital de Nantes. Permission à Paris, première visite à Apollinaire le lendemain de sa trépanation. Affecté au centre neuropsychiatrique de Saint-Dizier, dirigé par le Docteur Raoul Leroy, ancien assistant de Charcot, où il reste 4 mois : "C'est là (…) que j'ai pu expérimenter sur les malades les procédés d'investigation de la psychanalyse, en particulier l'enregistrement (…) des rêves et des associations d'idées incontrôlées. On peut déjà observer en passant que ces rêves, ces catégories d'associations constitueront, au départ, presque tout le matériel surréaliste" (Entretiens). Il découvre Freud dans le Précis de psychiatrie du Docteur Régis (Entretiens).
Envoyé au front (offensive dite de la Meuse) comme brancardier.
Naissance du mouvement Dada à Zurich, au Cabaret Voltaire (Jean/Hans Arp et Sophie Taeuber, Tristan Tzara et Marcel Janco, Richard Huelsenbeck et Hans Richter).
- 1917 : affecté comme infirmier militaire à Paris, il est attaché comme externe au Centre neurologique de la Pitié. Quitte avec regret la Pitié pour le Val de Grâce où, interne, il rencontre Louis Aragon où il suit des cours pour devenir médecin auxiliaire des armées. Ils fréquentent la librairie d’Adrienne Monnier, La Maison des Amis des Livres, rue de l’Odéon.
Création du ballet Parade (Jean Cocteau, Erik Satie, Pablo Picasso).
Première représentation, houleuse et interrompue, des Mamelles de Tirésias, drame surréaliste d'Apollinaire, mis en scène par Pierre Albert-Birot, à Paris. Jacques Vaché, déguisé en officier anglais, revolver au poing, somme de faire cesser le spectacle sous menace d'user de son arme contre le public. Breton parvient à le calmer. Apollinaire apparaît sur la scène et crie au public "Cochons !". Soupault faisait office de souffleur.
Début d'une correspondance avec Pierre Reverdy. Apollinaire lui présente Philippe Soupault.
Création de la revue Dada (à Zurich, puis Paris).
- 1918 : Manifeste Dada de Tristan Tzara.
D
ébut d'une véritable activité littéraire de Breton.
Rencontre Éluard à la première représentation de la pièce Couleur du Temps d'Apollinaire (cf. Nadja p. 27 : "comme à l'entracte je m'entretenais au balcon avec Picasso, un jeune homme s'approche de moi, balbutie quelques mots, finit par me faire entendre qu'il m'avait pris pour un de ses amis, tenu pour mort à la guerre. Naturellement, nous en restons là. Peu après, par l'intermédiaire de Jean Paulhan, j'entre en correspondance avec Paul Éluard sans qu'alors nous ayons la moindre représentation physique l'un de l'autre. Au cours d'une permission, il vient me voir : c'est lui qui s'était porté vers moi à Couleur du Temps.")

• 1919-1939 : entre les deux guerres

- 1919 : Breton rédige les Champs magnétiques avec Philippe Soupault, premier exemple d'écriture automatique à l'Hôtel des Grands Hommes près du Panthéon :
C'est 35 boulevard Saint-Michel, au café La Source, qu'André Breton lit à Aragon, qui vient d'être démobilisé, les quatre premiers chapitres des Champs magnétiques, encore tout frais. Son auditeur en est stupéfait, convaincu d'entendre là une voix nouvelle, extraordinaire de liberté et d'imagination.

À la fin des Champs magnétiques, Breton insère l'inscription suivante Bois & Charbons, courante à Paris au début du siècle : dans Nadja p. 27, on voit les deux amis se livrer à une déambulation dans Paris à la recherche de boutiques portant ce type d'enseigne reproduite en photographie.
Soupault fixe à 1919 la naissance du surréalisme, le mot venant d'Apollinaire.
Breton réussit l’examen de médecin auxiliaire.
Relation qui durera 6 mois avec Georgina Dubreuil qui habite rue Soufflot.
- 1920 : Tzara arrive à Paris, et s'installe chez Picabia que Breton vient de rencontrer. Breton vit à l'hôtel des Grands-Hommes près du Panthéon. Dans sa chambre sont accrochés des dessins ; Georgina Dubreuil, dans une crise de jalousie, quitte Breton après avoir brûlé des livres dédicacés par Apollinaire et des dessins de Derain, Laurencin, Modigliani et Vaché...
Il décide d'abandonner ses études de médecine. Ses parents, qui l’entretiennent, ayant été informés par voie de presse des manifestations et des scandales de ‘’Dada’’, viennent de Lorient le voir dans sa chambre. Outragés, ils menacent de lui couper les vivres s'il persiste dans ses activités "déshonorantes". Soupault, témoin de la scène, admire la fermeté qu’il montre en rompant avec eux, alors qu’il n’a d’autres ressources que celles qu’ils lui accordaient.
Valéry l'aide à obtenir un travail administratif à la NRF, au service des lecteurs et des abonnements. Il y relit les épreuves de Du Côté de Guermantes de Marcel Proust...
Parution des Champs magnétiques
Du ‘’Festival Dada’’ à la Salle Gaveau, Simone Kahn, qui épousera Breton l'année suivante, confie à sa cousine : "Je suis allée à une séance Dada, assez ratée à l'aveu même des pires dadaïstes, avec scandale, pommes cuites et vocifération."
Breton rencontre le couturier Jacques Doucet, mécène, bibliophile et amateur d'art moderne, qui lui commande des lettres sur la littérature et la peinture ainsi que des conseils d'achat d'œuvres d'art, pour une rémunération mensuelle (voir Trésors de la bibliothèque d'André Breton). Sa fonction consistait, chaque fois qu'il jugeait qu'une œuvre était digne d'intérêt, de lui écrire, alors qu'il le voyait journellement, quatre ou cinq lettres fort longues afin de la lui recommander. Après lecture de cette correspondance, qu'il voulait copieuse et documentée, Doucet se rendait dans l'atelier du peintre, tournait parmi les tableaux, et feignait de choisir de lui-même celui dont Breton lui avait fait l'éloge dans ses lettres. Cette époque fut l’une des seules où il bénéficia d’un certain confort matériel
- 1921 : Breton rencontre Freud à Vienne, qui ne le prend pas au sérieux, raconte Soupault.
- 1921 : il vit à l'hôtel 35 rue Delambre, 14e

- 1922 : il s'installe rue Fontaine, non loin de la Place blanche où le groupe surréaliste se réunit au café Cyrano.

- 1924 : en réaction aux funérailles nationales faites à l'écrivain Anatole France, Aragon, Breton, Joseph Delteil, Robert Desnos, Pierre Drieu la Rochelle et Éluard publient une série de textes regroupés sous le titre Un cadavre. Aragon et Drieu la Rochelle sont à l'origine de ce pamphlet. Drieu La Rochelle finance l'opération.
- 1926 : rencontre avec Nadja
- 1925 : les surréalistes publient une Lettre ouverte à M. Paul Claudel imprimée sur papier couleur sang de bœuf, rappelant ainsi que l'"action patriotique" dont se prévaut Claudel s'est limitée au commerce de viande, pour les armées, avec l'Amérique du Sud.
- 1927 : rencontre avec Suzanne
- 1928 : publication de Nadja
Discussion des surréalistes au sujet de l'amour sous tous ses aspects ; l'homosexualité masculine est condamnée par André Breton : "Je veux bien faire acte d'obscurantisme en pareil domaine. […] J'accuse les pédérastes de proposer à la tolérance humaine un déficit mental et moral qui tend à s'ériger en système et à paralyser toutes les entreprises que je respecte." (Marguerite Bonnet, André Breton, Œuvres complètes, tome 1, Gallimard, Pléiade, chronologie ; voir article développé de Luc Vigier sur le site www.louisaragon-elsatriolet.org quant à l'homophobie de Breton).
- 1927 : Breton entre au PCF
- 1930 : rupture avec Suzanne

Troisième manifeste du surréalisme de 1930, écrit par Robert Desnos, assassinant André Breton...

- 1932 : rupture avec Aragon.

- 1934 : rencontre avec Jacqueline Lamba, au centre de L'Amour fou. Qui est Jacqueline ? Jacqueline Lamba, elle-même artiste, découvre le surréalisme par son cousin qui lui fait lire les œuvres de Breton, et notamment Nadja, qui impressionne Jacqueline et lui donne l'envie de rencontrer son auteur… ce qui est fait en 1934.
Ils se marient moins de trois mois après leur rencontre : Giacometti est le témoin de Jacqueline, Paul Éluard celui de Breton et Man Ray immortalise cette journée par une photographie de Jacqueline posant nue au milieu des trois hommes, référence au tableau de Monet, Le Déjeuner sur l'herbe
- 1935 : naissance de sa fille Aube qui sera elle-même artiste
Jacqueline accompagne Breton en 1935 pour des expositions surréalistes à Prague puis à Santa Cruz de Tenerife.
- 1937 : parution de L’amour fou de Breton dont Jacqueline est le personnage central ; le voyage à Tenerife est évoqué.
- 1937 : Breton dirige quelque temps une galerie surréaliste 31 rue de Seine, à l'enseigne freudienne de Gradiva (Gradiva : une fantaisie pompéienne)
- 1938 : Breton est chargé de conférences sur l'art et la littérature, aussi Jacqueline et André Breton embarquent-ils pour quatre mois au Mexique, laissant leur fille de deux ans chez André Masson et sa femme... Ils sont accueillis par le couple par le couple Kahlo-Rivera chez qui ils rencontrent Trotski en exil... Breton écrit avec lui le manifeste Pour un art révolutionnaire indépendant (pour des raisons tactiques et de sécurité, le manifeste a été signé André Breton et Diégo Rivera).
Sur la photo, Léon Trotski, Diego Rivera, André Breton, Jacqueline Lamba et Frida Kahlo (qui eut une liaison avec Trotski...) en 1938. (Quand Frida viendra à Paris l'année suivante, elle logera chez Breton. Elle n'apprécie guère le regard d'André Breton sur son art ; elle s'en console auprès de Jacqueline, avec qui elle a une liaison...)
Au retour, il rompt avec Paul Éluard.
Il organise la première Exposition internationale du Surréalisme à Paris :

- 1939 : Breton est mobilisé à Poitiers.
Il découvre Julien Gracq avec la lecture d'Au château d’Argol, son premier roman et lui adresse une lettre enthousiaste, suivie d’une première rencontre à Nantes

• 1941-1946 : cinq années en Amérique

- 1941 : grâce à l’aide de la richissime Peggy Guggenheim, Breton et sa femme Jacqueline embarquent sur le “Capitaine-Paul-Lemerle”, le dernier bateau en partance pour les États-Unis, où montent aussi le peintre cubain Lam et l’anthropologue français encore inconnu, Lévi-Strauss ; à l'escale de Fort-de-France en Martinique, comme les autorités locales firent du zèle, les Breton furent internés au "camp de concentration" du Lazaret, une ancienne léproserie dont ils ne sortirent qu’après qu’il ait payé une caution. Comme ils ne furent pas aussitôt autorisés à repartir, suivit un temps de vacance forcée de trois semaines qui lui permit de découvrir la revue ’Tropiques créée par Césaire, qu'il rencontra aussitôt, et d’apprécier son œuvre qu’il trouva "belle comme l’oxygène naissant". Il arrive aux États-Unis pour 5 ans.
- 1942 : exposition surréaliste
- 1943 : il rencontre Élisa à New York, artiste chilienne, inspiratrice de la méditation d'Arcane 17 : elle sera sa troisième épouse.
- 1944 : ils voyagent en Gaspésie
- 1945 : ils visitent les réserves des Indiens Hopis. Breton fait des conférences à Haïti.

• 1946-1966 : activités artistiques et politiques

- 1946 : retour à Paris. Breton entend poursuivre les activités du surréalisme.
Les polémiques reprennent : contre Tzara se présentant comme le nouveau chef de file du surréalisme, contre Sartre qui considérait les surréalistes comme des petits-bourgeois, contre des universitaires, en démontant la supercherie d’un soi-disant inédit d’Arthur Rimbaud, contre Camus et les chapitres que celui-ci consacre à Lautréamont et au surréalisme dans L’Homme révolté.
- 1947 : André Breton s'intéresse de plus en plus près à l’Art brut avec Jean Dubuffet
Il donne fréquemment son concours pour nombre d’artistes inconnus en préfaçant les catalogues d’exposition, et participe à plusieurs revues surréalistes comme Néon, Médium, Le Surréalisme même, Bief, La Brêche...
- 1948 : André Breton s'engage activement en faveur d'une citoyenneté mondiale
- 1951 : Déclaration préalable de Breton au manifeste Surréalisme et anarchisme : "La lutte pour le remplacement des structures sociales et l’activité déployée par le surréalisme pour transformer les structures mentales, loin de s’exclure, sont complémentaires. Leur jonction doit hâter la venue d’un âge libéré de toute hiérarchie et toute contrainte."
- De 1953 à 1957 : il dirige pour le Club français du livre la publication des 5 volumes de Formes de l'Art, dont il rédige lui-même le premier tome : L'Art magique.

- 1958 : il signe avec d'autres surréalistes le tract du Comité de Lutte Anti-Nucléaire (CLAN), Démasquez les physiciens, videz les laboratoires, qui stigmatise les scientifiques au service des armements nucléaires
- 1959 : avec Georges Bataille, nouvelle Exposition internationale du surréalisme dédiée à Éros.
- 1960 : il signe le Manifeste des 121, déclaration sur le droit à l’insoumission dans la guerre d’Algérie. Il s'engage dans la défense du droit à l'objection de conscience.
- 1965 : il organise la 11e Exposition internationale surréaliste intitulée L’Écart absolu en référence à l’utopie fouriériste.
- 1966 : obsèques au cimetière des Batignolles. Le faire-part de décès portait ces seuls mots : ANDRÉ BRETON 1896-1966 Je cherche l'or du temps. Sur sa tombe, décorée simplement d'un octaèdre étoilé, au cimetière des Batignolles à Paris (17e), est gravée l’épitaphe Je cherche l’or du temps


Voix au chapitre a programmé André Breton en janvier 2021
http://www.voixauchapitre.com/archives/2020/breton.htm