L'avis de Clara

à propos de sa lecture des Vilaines de Camila SOSA VILLADA

C'est un roman très dur et très noir, et il m'a fallu du temps pour m'y habituer et rentrer dans cet univers.
On comprend dès le départ que le peu de joie et de douceur présents au début du roman vont peu à peu disparaître, ce qui nous pousse à en profiter pleinement.

Je n'irai pas jusqu'à dire que j'ai passé un bon moment en le lisant, tant les différentes scènes décrites sont dures, mais ce roman m'a fait voyager. L'Argentine rurale d'où vient le personnage principal, et l'Argentine cosmopolite où se situe le récit, sont très bien décrites. On ressent très bien ce que peuvent ressentir les trans en arrivant dans la maison d'Encarna, un havre de paix coloré et végétal au milieu de l'enfer. L'autre aspect très bien décrit me semble-t-il est l'atmosphère entre les trans elles-mêmes, ce mélange de fraternité et de rivalité.

Quant à la narration, les allers-retours entre présent et passé nous permettent de découvrir et de comprendre le personnage principal, d'en savoir plus sur sa construction. Ils donnent un peu de respiration dans ce récit et nous permettent de souffler, même si les scènes d'enfance ne sont pas plus joyeuses. Mais elles semblent empreintes de moins de fatalité.
S'il y a un moment dans ce roman qui m'a particulièrement marquée, c'est celui p. 88-89, lorsque le personnage décrit le regard des animaux pris dans les pièges du père. Je ne saurais dire pourquoi, mais ce rapport au regard m'a particulièrement touchée.

Il y a néanmoins quelques points qui ont été difficiles pour moi, notamment les éléments narratifs "fantastiques", tels que la trans loup garou ou celle se transformant en oiseau. J'ai du mal à comprendre leur intérêt narratif et ce que ces points sont censés apporter au roman.
De même la multiplication des scènes de violence était dure à soutenir, cela ressemblait parfois à une surenchère dans le malheur, même si à aucun moment ces scènes m'ont semblées irréalistes.

C'est un roman très noir où il manque peut-être une lueur d'espoir.
Les parents du protagoniste l'avertissent en lui disant que la seule voix pour les trans est la prostitution et il semble que malheureusement ce soit le cas ; à aucun moment dans le roman on n'entrevoit une autre voie de sortie.

Un dernier point sur ce roman, l'auteure y décrit la situation des prostituées trans, ils auraient été intéressant de mettre en parallèle la situation des autres prostituées qui elles aussi doivent subir violence et précarité.

Merci encore pour ce partage, j'ai été très heureuse de découvrir ce livre et cet univers vers lequel je ne serais certainement pas allée de mon propre chef.