Goethe avait une collection de 178 sous-vêtements en soie, et alors ?

Avec Salzmann, Herder, Lavater, Klinger, Lenz, Ernst Wolfgang Behrisch
et surtout Friedrich Heinrich Jacobi,
les relations n'auraient pas été seulement amicales ?

Goethe écrivit-il « C’est vrai que j’ai fait aussi l’amour avec des garçons mais je leur préférais les filles car quand elles me lassaient en tant que fille, je pouvais encore m’en servir comme garçon » (Michel Larivière, Dictionnaire historique des homosexuel-le-s célèbres) ?

Karl Hugo Pruys est allé y voir de plus près...

Karl Hugo Pruys
Die Liebkosungen des Tigres. Eine erotische Goethe-Biographie
Edition q, 1997 (traduit en anglais mais pas en français)

GOETHE ÉTAIT-IL GAY OU JUSTE TRÈS AMICAL ?
Par Lorraine Millot, Libération, 13 septembre 1997

L'icône de la littérature allemande, le classique des classiques, Johann Wolfgang Goethe, à qui les ligues de vertu ne pouvaient jusqu'alors reprocher qu'une attirance un peu trop vive et inconstante pour les jupons des dames, était en faithomosexuel ! C'est du moins ce qu'avance un journaliste, Karl Hugo Pruys, dans un livre publié en Allemagne, intitulé Les caresses du Tigre. Une biographie érotique de Goethe. Pour Karl Hugo Pruys, plutôt versé jusqu'à présent dans la politique, ancien porte-parole du parti conservateur CDU et auteur d'une biographie d'Helmut Kohl, il n'y a même plus place au doute : "Je suis fermement convaincu que Goethe était homosexuel, affirme-t-il. La légende selon laquelle Goethe était un homme à femmes est une pure invention. La seule femme de sa vie fut son épouse Christiane Vulpius. Ils ont eu un enfant, mais dormaient dans des chambres séparées et elle s'est tuée à force de boire."

Mais Kätchen Schönkopf, Friederike Brion, Susanna von Klettenberg, Charlotte Buff, Lili Schönemann, Charlotte von Stein, Minna Herzlieb, Marianne von Willemer, Ulrike von Levetzow, toute cette cour de femmes que l'on disait conquises par le poète ? "Goethe n'a eu de relations intimes et chaleureuses qu'avec des hommes, on le voit dans ses lettres, répond Pruys. Il était terrorisé par les femmes, elles le laissaient froid." À partir de la correspondance de Goethe, le journaliste estime même pouvoir nommer son amant, le philosophe Friedrich Jacobi. Goethe aurait eu "le coup de foudre", dès la première rencontre en 1774. Et le journaliste de citer une lettre du poète à son "Fritz": "Tu as senti, c'était pour moi un délice d'être l'objet de ton amour" Ne fais pas voir mes lettres !". Très sûr de lui, Karl Hugo Pruys conclut que Goethe a été "fondamentalement incompris" et que "des milliers de biographies et études sur lui vont devoir être réécrites".

Cette prétendue révision déchirante est évidemment contestée par les spécialistes patentés de Goethe en Allemagne. Affirmer que Goethe était gay témoigne d'une profonde méconnaissance des amitiés viriles du XVIIIe, a déjà rétorqué Werner Keller, autorité en la matière. "C'était un siècle d'amitiés enthousiastes entre hommes, a expliqué l'expert. Les mots d'amour dans les lettres de Goethe exprimaient un sentiment d'amitié chaleureux, passionné. Pas une attirance homosexuelle." En l'absence de témoins qui pourraient narrer leurs expériences sexuelles avec Goethe, chacun est libre de laisser courir ses fantasmes.

Lorraine Millot, correspondante à Bonn